Paris - À 79 ans, Tadao Ando apprécie toujours autant les figures géométriques mères.
Pour la Punta della Dogana, à Venise, l’architecte japonais avait réalisé la quadrature du triangle, incluant à l’intérieur de ce bâtiment qui suit scrupuleusement les limites d’une parcelle à trois côtés, un majestueux espace d’exposition de plan carré. À Paris, dans l’ancienne Bourse de commerce rénovée qui, désormais, hébergera le fonds d’art contemporain du collectionneur François Pinault, il plante, tel un monolithe kubrickien, un monumental cylindre en béton brut lissé : 20 m de diamètre, 9 m de haut et 50 cm d’épaisseur. Dans cet édifice du XVIIIe siècle, on ne saurait être plus radical. « Si un bâtiment ne communique rien, ce n’est pas de l’architecture », aime à répéter le Pritzker Prize 1995. Sans aucun doute, l’homme se sera aussi souvenu de son émotion lors de la découverte, jadis, du Panthéon, à Rome, et de sa coupole de 43 m de diamètre : « Faire l’expérience de cet espace m’a beaucoup appris sur les liens entre lumière et architecture. » Sa métamorphose de la Bourse de commerce en centre d’art est d’ampleur. Surface totale : 10 500 m2, dont 6 800 m2 accessibles au public – espaces d’exposition compris. Coût des travaux : non ébruité. Lorsqu’on pénètre à l’intérieur de la Bourse, on ne perçoit, dans un premier temps, que par fragments, l’œuvre maîtresse d’Ando, à travers les baies vitrées du vestibule. Ce n’est qu’une fois parvenu dans la rotonde que s’offre à nous, dans toute sa puissance, le cylindre de béton aux ouvertures dissymétriques, noyau du projet. Au rez-de-chaussée, celui-ci devient la salle d’exposition majeure du lieu (660 m2). Décalé de quelque cinq mètres de la façade intérieure érigée, au XIXe siècle, par Henri Blondel, il génère à la fois un espace de circulation horizontal et organise la desserte verticale, accueillant, sur sa face externe, une série d’escaliers desservant les différents niveaux grâce à des passerelles qui relient la structure annulaire classée sans même la toucher. Outre le rez-de-chaussée, les autres galeries (il y en a sept en tout, de divers volumes et hauteurs sous plafond) se déploient aux 1er et 2e étages. Le restaurant avec vue panoramique se juche, lui, au 3e étage. Le sous-sol, enfin, loge, entre autres, un foyer, une « black box » pour œuvres sonores et vidéo et un auditorium de 284 places. Au 2e étage, la coursive-promenoir qui ourle la crête du cylindre de béton permet d’admirer, au plus près, la gigantesque fresque peinte en 1889 ornant la base de la coupole, ainsi que la verrière, non moins spectaculaire.La lumière naturelle qui s’infiltre dissipe à l’envi la matérialité du béton. L’espace cylindrique tend alors vers l’abstraction, flirtant presque avec l’architecture « métaphysique » d’un De Chirico.
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La Bourse où l’art vit
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°740 du 1 janvier 2021, avec le titre suivant : La Bourse où l’art vit