L’exposition «Â Passions secrètes » au Tripostal de Lille révèle l’extrême dynamisme des collectionneurs d’art contemporain flamands.
LILLE - Après François Pinault, la Saatchi Gallery et Emmanuel Perrotin, c’est au tour de dix-huit collectionneurs flamands de se retrouver sous les feux des projecteurs dans les 6 000 mètres carrés du Tripostal de Lille. Soit des entrepreneurs de l’industrie textile, mais aussi des avocats, médecins ou chefs d’entreprise dans le BTP. Tous résident dans les environs de Courtrai (Belgique), appelé parfois le « Texas » de la Flandre, non loin de Lille. Nés après la Seconde Guerre mondiale, ils ont commencé pour la plupart à collectionner dans les années 1980. « Ce n’est pas un phénomène propre à Courtrai car on retrouve des phénomènes similaires à Gand, Anvers, Bruges. Il y a une vraie tradition de collectionneurs en Belgique et dans les Flandres tout particulièrement. Souvent, c’est une tradition familiale. Mais ce qui fait la spécificité de Courtrai, c’est la concentration de grands collectionneurs sur une toute petite zone », souligne la commissaire de l’exposition, Caroline David, qui a sélectionné environ 150 œuvres parmi les 4 000 qui lui ont été proposées. Des photographies, installations, sculptures, peintures et quelques vidéos, datées des années 1970 jusqu’à aujourd’hui, des œuvres pour certaines monumentales. Mais inutile de chercher qui possède quoi – « certains collectionneurs ne voulaient pas que leur nom apparaisse », précise la commissaire. Petite consolation pour les curieux, une commande a été passée à Gautier Deblonde. Ce dernier, connu pour ses vues d’ateliers d’artiste, a photographié les intérieurs des collectionneurs, ouvrant une porte sur leur intimité. Quelques-unes de ces images sont reproduites à l’échelle 1 dans l’exposition. Pour les autres, il faudra consulter le catalogue.
Un tropisme américain
Sur les trois étages du Tripostal, le parcours se déploie à travers des rapprochements visuels et conceptuels souvent réussis et bien rythmés. Le rez-de-chaussée se conjugue au féminin avec une araignée menaçante de Louise Bourgeois, des autoportraits de Francesca Woodman. Y figure aussi la fornication étrangement humaine entre une biche et un cerf de Wim Delvoye. Autre fil rouge de l’accrochage : celui de l’Amérique. « Les Belges sont très anglo-saxons. Ils ont un tempérament plus porté vers Londres et New York que vers Paris ou Rome. La création américaine émergente ou moins émergente les intéresse beaucoup », explique Caroline David. Parmi les 80 artistes présentés (quasiment tous occidentaux), 26 sont américains. Mais plus nombreux encore sont les artistes collectionnés (américains ou non) qui parlent de l’Amérique. Introduite par l’installation de Sam Durant évoquant les tortures des détenus de Guantánamo, cette thématique se décline à travers des visions faites de répulsion et de fascination, à l’instar de celles de Joseph Beuys qui s’enferma dans une galerie new-yorkaise avec un coyote ou de Danh Vo qui disperse des morceaux dupliqués d’après la statue de la Liberté aux quatre coins du monde. Ces « Passions secrètes » sont aussi l’occasion d’apprécier la scène belge, avec des artistes confirmés comme Berlinde De Bruyère, Michaël Borremans, Panamarenko et des plus jeunes tel Ruben Bellinkx qui propose une bien étrange nature morte vivante.
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Des passions dévoilées
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Abonnez-vous dès 1 €Tripostal, av. Willy-Brandt, 59000 Lille, jusqu’au 4 janvier 2015, du mercredi au vendredi 12h-19h, samedi-dimanche 10h-19h, www.lille3000.eu
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°423 du 14 novembre 2014, avec le titre suivant : Des passions dévoilées