PARIS
Le titre de l’exposition, « Joan Mitchell/Jean Paul Riopelle, un couple dans la démesure », est éloquent.
Logée au pavillon Pierre Lassonde, la splendide nouvelle aile du Musée national des beaux-arts du Québec, l’exposition crée l’événement. Si Riopelle fait ici figure de héros local, Mitchell reste plus célèbre aux États-Unis ou en Europe qu’au Canada. Moins connue encore, pour le public, mais également pour la majorité des spécialistes, est l’histoire d’amour qui dura pendant vingt-cinq ans entre les deux peintres. De fait, entre 1955 et 1979, entre Paris, lieu de leur rencontre, et l’Amérique du Nord, ils mènent une aventure plutôt tumultueuse. C’est le prétexte romantique, voire tragique – leur séparation fut douloureuse –, à cette manifestation. Il aura fallu attendre un certain apaisement entre les descendants de ces deux artistes pour que soit mis en place ce va-et-vient étonnant. Projet risqué, car il était facile de glisser vers le roman-photo, style Diego Rivera et Frida Kahlo ou Rodin et Camille Claudel. Toutefois, le mérite de l’exposition est de ne pas s’attarder sur le côté anecdotique de cette relation, mais de montrer que le coup de foudre fut au moins autant artistique que sentimental. Le double parcours chronologique permet de voir que des échanges d’ordre esthétique se développent tout au long de la durée de leur relation. Certes, ce dialogue est facilité par la proximité de la pratique picturale dès avant la rencontre des deux artistes – l’un et l’autre avaient été inspirés par le surréalisme et par l’abstraction. Cependant, chacun d’eux a une démarche spécifique : une gestualité ample et des formes circulaires, des variations saisonnières de la lumière exprimées par des frémissements et des transparences chromatiques chez Mitchell, qui fait partie de la seconde génération des expressionnistes abstraits ; des compositions plus tendues, plus graphiques, une matière plus abondante, directement appliquée à partir d’un tube de couleur ou à l’aide d’un couteau avec Riopelle. Il n’en reste pas moins que, graduellement, leurs œuvres, de format important, dégagent le même souffle lyrique, la même émotion ressentie face à une nature remémorée et transposée.
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De l’amour et de la peinture fraîche
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°707 du 1 décembre 2017, avec le titre suivant : De l’amour et de la peinture fraîche