Peu de gens auraient parié sur la création du centre d’art le Plateau quand s’est constituée, il y a six ans, une association visant à lutter contre le projet immobilier qui devait se construire aux Buttes-Chaumont sur l’emplacement des anciens studios de la SFP.
Aujourd’hui, les logements existent bel et bien, mais le nombre des appartements a été réduit, le complexe s’est davantage ouvert sur le quartier et, surtout, les riverains ont réussi à négocier l’ouverture d’un espace entièrement dédié à la création contemporaine. Rejoint entre-temps par le Fonds régional d’art contemporain Île-de-France qui cherchait depuis longtemps un espace d’exposition, le projet se réalise aujourd’hui avec l’appui de nombreux partenaires institutionnels. Ainsi, la Région Île-de-France a versé 565 000 francs, le ministère de la Culture 850 000, la Ville de Paris 700 000 et 635 000 francs ont été apportés par le propriétaire des murs, le groupe Bouygues. Ce dernier a accordé au Frac, qui est juridiquement le gestionnaire du lieu, un bail emphytéotique de trente ans.
Tout comme le Palais de Tokyo, le Plateau s’ouvre aujourd’hui avec, à sa tête, une codirection assumée par le directeur du Frac, Bernard Goy, et Éric Corne qui a pris la tête du mouvement citoyen. “J’ai des responsabilités par rapport à ce quartier, parce que je suis artiste”, estime ce dernier. L’histoire de la rencontre entre cette association de riverains et le Frac est ainsi liée au désir d’ouvrir un lieu professionnel. Pour autant, le Plateau ne sera pas identifié à 100 % avec le Frac. Celui-ci devrait se contenter dans un premier temps d’y montrer une fois par an des œuvres issues de sa collection autour de thématiques liées à la géographie particulière du quartier. La première d’entre elles, “Objets de réflexion”, est programmée pour le 13 juin, et sera ouverte jusqu’au 18 août. La collection du Frac Île-de-France comprend aujourd’hui environ six cents œuvres qui sont pour la plupart conservées dans des réserves à Saint-Denis. Peu de pièces sont mises en dépôt dans des institutions, sauf celles présentées au Musée de Pontoise et au Musée d’art contemporain de Montréal, au Canada. Bernard Goy, qui est le directeur de la structure depuis 1992, a également initié l’élaboration du catalogue de ce fonds assez éclectique, et qui, outre la prise en compte d’une représentativité régionale, comprend, entre autres, des créations de l’Art concret et de l’Abstraction lyrique. L’institution a quitté ses locaux du quartier de l’Opéra, pour venir s’installer à proximité du Plateau, rue des Alouettes.
Aménagé par les architectes Valode & Pistre, associés à Jean-Marc Lalo, l’espace, qui ouvrira ses portes pour une préfiguration de quatre jours, à partir du 17 janvier, s’inscrit résolument dans la tradition des cubes blancs. Les hauteurs sous plafond sont relativement modestes, mais la superficie – 600 m2 – l’est beaucoup moins. Elle permet ainsi à Éric Corne, qui est également – et pour trois ans – directeur de la programmation du Plateau, de proposer pour l’ouverture du mois de janvier une invitation à de nombreux artistes, sans pour autant se restreindre stricto sensu aux arts plastiques. À côté d’une commande publique de mobilier passée à Frédéric Ruyant sera présenté un “wall drawing” de Julije Knifer, des œuvres de Valérie Jouve, Elizabeth Ballet, Stéphane Calais, Loris Gréaud, Elke Krystufek, Frédéric Bruly-Bouabré, Marie Legros, Fiorenza Menini, Alexandra Sà, Amal Saade… L’association Light Cone, qui défend le cinéma expérimental, devrait également proposer au Plateau des films dont la thématique est centrée sur l’espace urbain. “Il faut sortir des médiums ou les faire se rencontrer”, estime Éric Corne. De la musique expérimentale devrait ainsi également être proposée rue des Alouettes. La première véritable exposition du nouveau centre d’art, “Premiers mouvements”, ouvrira quelques mois plus tard, le 7 mars exactement, avec un hommage à Robert Filliou. Sylvie Jouval, commissaire d’exposition invitée, a également souhaité y associer d’autres artistes parmi lesquels Les Acolytes de l’art, André Cadere, Harun Farocki, Eric Hattan, Hans Jürg Kupper, Marie Legros, Gordon Matta-Clark, Bruce Nauman, Santiago Reyes, Till Roeskens, Francisco Ruiz de Infante et Dana Wyse. De plus, de la danse est prévue le 26 avril avec Ixkizit/Joël Borges. Le Plateau entend également s’ouvrir à l’international en accueillant des artistes peu montrés en France, à l’exemple de l’exposition qui sera organisée au mois de décembre et qui réunira des créateurs actifs en Colombie et au Mexique.
Le lieu dispose également d’un second espace plus particulièrement réservé aux actions pédagogiques notamment destinées aux scolaires. Au total, le Plateau qui emploie cinq personnes, offrira quatre à cinq expositions par an. Si l’on est loin de la multitude d’événements annoncés par le Palais de Tokyo, le Plateau n’entend pas pour autant travailler en autarcie. “Ce lieu sera ouvert sur le plan artistique et devra générer des coproductions, des échanges avec des lieux en région, professionnels ou pas”, promet déjà Éric Corne.
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Dans le XIXe, l’art sur un plateau
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Abonnez-vous dès 1 €Le Plateau, 33 rue des Alouettes, 75019 Paris, tél. 01 53 19 88 10. Ouverture du 17 au 20 janvier, puis à partir du 7 mars.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°140 du 11 janvier 2002, avec le titre suivant : Dans le XIXe, l’art sur un plateau