La mainmise du gouvernement américain sur le pavillon des États-Unis de la Biennale de Venise n’est pas chose nouvelle. Elle nourrit même, depuis longtemps, les fantasmes de toutes sortes.
Le cas plus célèbre est sans nul doute la remise du prix de la Biennale 1964 à Robert Rauschenberg, qui consacre la victoire internationale du pop art et de la scène artistique new-yorkaise. Dans le milieu de l’art européen, c’est une déflagration, un « coup violent » comme l’explique l’historienne de l’art Béatrice Joyeux-Prunel, « en particulier aux Parisiens encore persuadés de leur centralité ». Les Français crient très vite au scandale. Il faut dire qu’Alan Solomon, directeur du Jewish Museum de New York et commissaire de la section américaine à la Biennale, proclame avant même que le jury ne se soit prononcé : « New York a remplacé Paris comme centre du monde de l’art ! »
À cette époque-là, c’est la United States Information Agency, l’organisation fédérale du Département d’État chargée de la propagande internationale, qui sélectionne les artistes américains envoyés à Venise. Il n’en faut pas plus pour faire naître des « approches révisionnistes », comme les nomme Joyeux-Prunel : « Du point de vue le plus mal informé, les photographies de l’énorme avion militaire prêté par l’US Air Force pour transporter les œuvres états-uniennes vers Venise prouvaient l’interventionnisme des États-Unis dans cette affaire. » On accuse aussi la CIA et Leo Castelli, le marchand de Rauschenberg, de collusion pour l’obtention du prix. L’historienne de l’art Hiroko Ikegami a depuis montré que ce sont en fait surtout les Italiens qui portèrent Rauschenberg plus que les autres parmi les jurés. Pour le Département d’État, cela reste tout de même un triomphe.
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1964 : Le pavillon américain, outil de propagande ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°588 du 29 avril 2022, avec le titre suivant : 1964 : Le pavillon américain, outil de propagande ?