À Rennes, les Champs Libres proposent la première exposition en France entièrement consacrée à la figure d’Arthur. Relecture d’un roi mythique, tour à tour personnage de roman, star du cinéma d’animation et héros de jeux vidéo.
C'est l’un des mythes les plus persistants de la littérature européenne. L’histoire du roi Arthur, né d’une liaison adultérine, rendue possible grâce à la complicité de Merlin l’Enchanteur, entre le roi Uther Pendragon et Ygerne, dont l’époux est retenu au combat. Recueilli et élevé par Merlin, Arthur gagne sa légitimité après avoir réussi à desceller l’épée Excalibur fichée dans un roc.
Il règne depuis dans son château de Camelot, en Bretagne insulaire, où se réunissent les chevaliers de la Table ronde. Parmi eux se trouvent Perceval, Lancelot, Gauvain, Galahad, Tristan et Yvain, tous chargés de la quête du Graal, la précieuse coupe rapportée de Palestine par Joseph d’Arimathie, et dans laquelle aurait été recueilli le sang du Christ. Une seule place demeure vacante : le siège périlleux, réservé au vainqueur de la quête de la précieuse relique.
Arthur et l’invention du roman
Mais le royaume d’Arthur vacille et s’effondre à cause de la liaison qu’entretient la reine Guenièvre avec Lancelot. Et Arthur sera retrouvé mourant à l’issue de la bataille de Camlann, qui l’oppose à Mordred, qui n’est autre que le fils incestueux né d’une liaison avec sa propre sœur, Morgane. Transporté par des fées sur l’île d’Avalon, nul ne sait ce qu’il adviendra d’Arthur...
Tous les ingrédients du roman épique sont ici réunis : les prouesses guerrières et chevaleresques, la quête de l’absolu, l’amour, la mort, mais aussi les faiblesses qui perdent l’homme. Autant de thèmes universels qui expliquent le succès ininterrompu des légendes arthuriennes. Leur origine remonte au XIIIe siècle, date à laquelle Chrétien de Troyes écrit ses Romans de la Table ronde.
Ces textes rédigés en langue vernaculaire, qui sont aussi les premiers romans de l’histoire de la littérature française, sont le fruit d’un curieux syncrétisme, mêlant structure de la tragédie grecque, histoires inspirées d’anciennes légendes celtes et anglo-normandes, culture de la chevalerie et de l’amour courtois médiévaux, le tout étant christianisé sous la plume de Chrétien de Troyes. Arthur, roi païen connu grâce à la chronique de Geoffroy de Monmouth, l’auteur de la première histoire des rois britanniques (Histoire des rois de Bretagne, 1135/1138), y devient en effet la figure du roi preux médiéval.
Laissé inachevé, le dernier de ces textes, Le Conte du Graal, va être à l’origine d’innombrables continuations mettant en scène les personnages de Chrétien de Troyes, constituant ce que les spécialistes appellent la « matière de Bretagne ». Plusieurs centaines de manuscrits arthuriens sont ainsi encore aujourd’hui conservés.
La bonne fortune du roi Arthur
Le sujet deviendra plus tard le support d’un phénomène identitaire celte, unissant la Grande-Bretagne, d’où est originaire Arthur, et la Petite-Bretagne (l’Armorique), où se déroulent quelques épisodes des aventures de Merlin, Viviane et Lancelot. C’est notamment dans la forêt de Brocéliande (ou forêt de Paimpont), à une trentaine de kilomètres de Rennes (lire Autour de l’exposition), que se trouverait le Val sans Retour, où la fée Morgane enfermait les chevaliers infidèles, mais aussi le tombeau de Merlin.
Après le Moyen Âge, le mythe connaîtra plusieurs revivals, notamment au XIXe siècle. Dans les années 1880, le compositeur Richard Wagner réexplore les légendes arthuriennes avec son opéra Parsifal, inspiré de l’épopée de Perceval. En Angleterre, la compilation de mythes arthuriens de sir Thomas Malory, datée du XVe siècle, est remise au goût du jour par le groupe des peintres préraphaélites. Au XXe siècle, après le conte moderne de Guillaume Apollinaire (L’Enchanteur pourrissant, 1909), le thème se popularise par le biais de la littérature enfantine puis du 7e art et de la bande dessinée. Aujourd’hui encore, jeux vidéo et fictions télévisées perpétuent la légende du roi Arthur.
L’exposition organisée à Rennes aux Champs Libres, la première en France à être exclusivement consacrée à ce sujet, a été bâtie à partir de cet important matériau constitutif du mythe. Ses commissaires, Patrick Absalon (lire Questions à...) et Sarah Toulouse, ont opté pour une exposition thématique, qui reprend les grands jalons de la légende – le réel et l’imaginaire, les stratégies politiques et amoureuses, la naissance d’un mythe –, croisant objets d’époques différentes dans une scénographie spectaculaire propice à une immersion totale.
Entre 456 et 492 Naissance d’Arthur. Entre 472 et 495 Mort du père d’Arthur, Uther Pendragon, dont Merlin l’Enchanteur était l’ami et le conseiller. Ce dernier organise le défi de l’épée d’Excalibur qui permet à Arthur, fils illégitime d’Uther, de succéder à son père. Entre 473 et 510 Règne d’Arthur. Entre 480 et 540 Victoire des Bretons sur les Saxons au mont Badon. Entre 532 et 565 Arthur trouve la mort à la bataille de Camlann.
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Arthur
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°605 du 1 septembre 2008, avec le titre suivant : Arthur