Créée en 1914, la Caisse nationale des monuments historiques et des sites a vécu. Désormais baptisé Centre des monuments nationaux, l’établissement, chargé de la présentation au public d’une centaine de monuments historiques appartenant à l’État, a été doté de nouveaux statuts et s’est vu assigner une nouvelle mission, qui, en réalité, prolonge les évolutions antérieures, avec pour leitmotiv l’ouverture à la création contemporaine.
PARIS - Depuis plus de dix ans, la Caisse nationale des monuments historiques et des sites a connu de profondes évolutions ; la transformation de cette institution en Centre des monuments nationaux (CMN) devrait les approfondir plus que les renouveler. Si le lien administratif avec la direction de l’Architecture et du Patrimoine (DAPA) est assoupli par le retour à une présidence autonome, le CMN, par la façon dont ses missions sont définies, se présente comme le fidèle exécutant de la politique du ministère. Ancien membre du cabinet de Jack Lang à la Culture, Jacques Renard, nommé président du CMN, a été chargé de la mettre en œuvre avec un double objectif : “susciter un dialogue entre la création et le patrimoine, et attirer, grâce au développement de l’action culturelle, un public plus nombreux, et plus particulièrement un public français et de proximité.” La création contemporaine était “déjà présente de façon ponctuelle mais pas systématique, explique Jacques Renard. Les artistes et les œuvres doivent entrer dans les monuments nationaux pour que ceux-ci deviennent des pôles d’action culturelle.” De plus, l’installation d’équipes d’artistes est sérieusement envisagée.“Au château de Pierrefonds, il y a tous les ans un festival de théâtre en juillet. Le projet du directeur du festival est de le transformer en centre européen d’art dramatique toute l’année. C’est exactement le genre de projet que nous souhaitons soutenir. De la même manière, dans le domaine des arts plastiques, les œuvres créées à l’occasion de “Changement de temps” pourraient rester en place après la manifestation.” De façon générale, les administrateurs sont appelés à “dialoguer au quotidien avec les directeurs du centre d’art dramatique, du centre d’art et de la bibliothèque, afin qu’un réseau d’institutions culturelles fonctionne au niveau local”.
L’ouverture au monde contemporain, alpha et omega du discours ministériel sur le patrimoine, peut se décliner de multiples façons, à commencer par l’extension du périmètre vers l’architecture du XXe siècle, sous-représentée, au sein des monuments nationaux. La villa Savoye, de Le Corbusier, se trouve effectivement isolée parmi une centaine de châteaux, abbayes et sites archéologiques. Le XIXe siècle, logé à la même enseigne, ne semble pas constituer une telle priorité. Trop “ringard” sans doute. Par ailleurs, alors que le budget réservé à l’enrichissement des collections – des crédits délégués par la DAPA – reste très faible, de l’ordre de trois millions de francs par an, Jacques Renard entend mener une politique d’achat de mobilier contemporain. Charité bien ordonnée, elle commencera par son propre bureau et la salle de réunion du Centre, à l’Hôtel de Sully. Du grain à moudre en perspective pour ceux qui regrettent une trop grande évaporation des crédits au niveau central. Malgré un budget annuel de 450 millions de francs, auquel s’ajoutent les salaires du personnel de l’État travaillant pour l’établissement (environ 150 millions), les moyens dont disposent les administrateurs sont jugés “insuffisants”. Au château d’Angers Laurent Heulot, son administrateur, note par exemple “le manque de moyens humains pour préparer la saison touristique et les opérations d’action culturelle, qui demandent beaucoup de travail administratif”. En effet, l’incantation moderniste ne doit pas occulter ce qui demeure l’une des principales missions du CMN, la transmission d’un savoir, d’une histoire. Ce travail développé depuis de nombreuses années dans chaque monument, notamment en direction des scolaires, est évidemment moins spectaculaire.
“L’existence d’un projet culturel par monument permettra de mobiliser plus facilement les crédits”, tranche Jacques Renard. Les administrateurs, dont le rôle est pleinement reconnu et dont l’autonomie est accrue par les nouveaux statuts, à la grande satisfaction des intéressés, jouent naturellement un rôle clé dans la définition de ce projet. “Il faut trouver le moyen pour que les travaux de restauration et d’aménagement soient en phase.” Les administrateurs sont également invités “à développer les partenariats, car, en menant des projets conjoints, on développe les financements”. À ce propos, la réforme manque une bonne occasion de revoir la répartition des rôles entre le CMN et la DAPA. Aujourd’hui, tandis que le premier prend en charge les travaux d’aménagement, la seconde finance les opérations de restauration. “On ne revient pas sur cette division, confirme le président du CMN. D’ailleurs, les crédits de restauration de la DAPA sont plus importants qu’on ne le croit : il y a 1,2 milliard en France pour la restauration des monuments historiques appartenant à l’État ou dont l’État est maître d’ouvrage. Sur cette somme, 25 millions seulement sont consacrés à celle des monuments nationaux [hors cathédrales].” 25 millions, c’est justement le coût – exorbitant – du réaménagement et de l’extension de l’espace d’accueil à Chambord…
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Un ravalement de façade
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°107 du 9 juin 2000, avec le titre suivant : Un ravalement de façade