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Les nouveaux sites du Patrimoine mondial

Lors de sa session annuelle, le comité de l’Unesco a tiré la sonnette d’alarme sur la situation dramatique du Mali

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 3 juillet 2012 - 783 mots

SAINT-PETERSBOURG - Réuni depuis le 26 juin et jusqu’au 6 juillet, à Saint-Pétersbourg, en Russie, pour sa 36e session, le Comité du patrimoine mondial de l’Unesco a classé de nouveaux sites, dans un contexte géopolitique particulièrement tendu.

Malgré les vives protestations d’Israël, l’Unesco a inscrit sur la Liste du patrimoine mondial en péril le site de l’église de la Nativité de Bethléem, en Cisjordanie, usant à cet effet d’une procédure d’urgence. Une décision hautement symbolique puisqu’il s’agit du premier site palestinien à rejoindre la Liste du patrimoine mondial. Le président palestinien a aussitôt salué « une victoire pour [la] cause [de son pays] et la justice », tandis que le Premier ministre israélien a dénoncé des « mobiles politiques et non culturels ». L’inscription a été rendue possible par l’admission de la Palestine, le 31 octobre 2011, comme État membre à part entière de l’Unesco.

Les 21 pays membres ont, par ailleurs, donné suite à la demande du gouvernement du Mali, dont le nord du pays est contrôlé depuis la fin mars par des groupes armés islamistes (lire le JdA no 371, 8 juin 2012), en inscrivant sur la Liste du patrimoine mondial en péril Tombouctou et le tombeau des Askia, édifié au XVe siècle dans la région de Gao. L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture a exhorté les pays voisins à une grande vigilance pour prévenir le trafic d’objets culturels. Surnommée « la perle du désert », Tombouctou était classée Patrimoine mondial depuis 1988 ; le tombeau des Askia l’était depuis 2004. Deux jours après, le 30 juin, en représailles à cette décision, des membres du groupe armé Ansar Dine ont détruit à Tombouctou des mausolées de saints musulmans, parmi lesquels les sanctuaires de Sidi Mahmoud, Sidi Moctar, Alpha Moya, puis ceux de Cheik el-Kébir, situés dans l’enceinte du cimetière de Djingareyber.

La ministre malienne des Arts, du Tourisme et de la Culture, Diallo Fadima, présente à la session annuelle de l’Unesco, a appelé « l’ONU à prendre des mesures concrètes pour mettre fin à ces crimes contre l’héritage culturel de la population », tandis que le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda, a déclaré que les destructions en cours constituaient « un crime de guerre », passible en conséquence de poursuites. L’association des leaders religieux du Mali a elle aussi condamné « le crime de Tombouctou ». À l’heure où nous mettons sous presse, le groupe poursuivait sa destruction de biens religieux en s’attaquant à une mosquée du XVe siècle, dont une porte sacrée avait déjà été saccagée.

Les charbonnages
Nouvelles beaucoup plus réjouissantes pour le continent africain, cinq nouveaux sites ont été inscrits par le comité international : Grand-Bassam en Côte d’Ivoire (ancienne capitale du pays pendant la colonisation française) ; le pays Bassari au Sénégal ; les lacs d’Ounianga au Tchad ; le parc trinational de la Sangha, vaste réserve naturelle de 3 millions d’hectares située au Cameroun, en Centrafrique et au Congo, ainsi que la capitale marocaine Rabat (notamment sa ville nouvelle, le Jardin d’essais et les jardins historiques, la médina, la kasbah des Oudayas, les remparts et les portes almohades ainsi que le site archéologique de Chelah).

De l’autre côté de la Méditerranée, en France et en Wallonie, l’heure était à la fête avec l’inscription de sites miniers. L’inscription du bassin minier du Nord - Pas-de-Calais marque une étape importante dans la reconnaissance d’un territoire ayant souffert d’une reconversion douloureuse après trois siècles d’exploitation charbonnière. Le Bassin minier uni (le BMU), qui défendait son dossier depuis dix ans, est parvenu à convaincre l’Unesco de l’importance de cet héritage, reconnu désormais comme « paysage culturel évolutif ». Il s’agissait de la seule demande française, après que le pays eut renoncé à demander l’inscription de la grotte Chauvet « en urgence », dans les gorges de l’Ardèche – le dossier devrait être présenté pour 2013 via la procédure normale.

L’Unesco a également inscrit quatre sites miniers de Wallonie : le Grand-Hornu, Bois-du-Luc, Bois du Cazier et Blegny-Mine, lieux emblématiques de l’industrie du charbon en Belgique, du début du XIXe siècle à la seconde moitié du XXe. Signalons, en outre, l’inscription du patrimoine archéologique de la vallée de Lenggong en Malaisie, de la ville de garnison frontalière d’Elvas et ses fortifications au Portugal, du paysage du Grand-Pré au Canada, de l’Opéra de Bayreuth en Allemagne, du site fossilifère de Chengjiang en Chine, du site néolithique de Catal Höyük en Turquie ou encore des paysages cariocas de Rio de Janeiro. En revanche, Liverpool-Port Marchand pourrait perdre son inscription sur la prestigieuse liste en raison du projet de construction de « Liverpool Waters », une extension du centre-ville qui dégraderait le profil du site.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°373 du 6 juillet 2012, avec le titre suivant : Les nouveaux sites du Patrimoine mondial

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