Un constat s’impose : malgré les vicissitudes économiques, partout dans le monde, musées et lieux d’exposition ont maintenu en 2012 une programmation riche et dense. Soumis à des impératifs d’audience et de recettes commerciales, ils ont bien sûr souvent recours à des têtes d’affiches. Le Centre Pompidou compte sur Matisse et Dali pour attirer en masse les visiteurs, quand Le Louvre sort la carte Raphaël. Les « inusables » Bonnard (Fondation Beyeler, à Bâle), Chagall (La Piscine, à Roubaix) ou Hopper (Grand Palais, à Paris ; Musée Thyssen-Bornemisza, à Madrid) continuent leur tour du monde, alors que Vienne lance son atout avec Klimt dont on fête le cent cinquantenaire de la naissance. Pourtant ici et là, notamment en France, s’annoncent quelques expositions thématiques plus pointues, telles que « Bohèmes » au Grand Palais, « 1917 » au Centre Pompidou Metz ou « Les Maîtres du désordre » au Quai Branly. 2012 est aussi une année faste pour l’art contemporain, avec la quinquennale Documenta à Kassel (Allemagne), et en France simultanément la Triennale de Paris au Palais de Tokyo et un Monumenta avec Daniel Buren.
Bonnard en 60 tableaux
Fondation Beyeler - Pierre Bonnard - 29 janvier / 13 maiSix ans après la rétrospective magistrale consacrée à Pierre Bonnard qui s’était tenue au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, la Fondation Beyeler, à Bâle-Riehen (Suisse), propose au public suisse de (re) découvrir plus d’une soixantaine de tableaux du peintre français. Comme Cézanne, Bonnard est de ces maîtres du début du XXe siècle qui ont défriché le terrain de la modernité tout en gardant des liens très solides avec le classicisme, en l’occurrence le nu et la nature morte. Le souffle pétillant de la vie parisienne, électrisée par un nouvel urbanisme, ne l’a pas vraiment touché. Aux trottoirs en asphalte, aux immeubles en pierre de tailles, et aux toits de zinc, il a fini par préférer la nature sauvage de la Provence, ses couleurs chatoyantes et son intemporalité. Tournant le dos à la folle ambiance des cafés et des Folies Bergère, il célébrait l’intimité de son cercle familial. Cette manifestation est la première du genre en Helvétie depuis 1999, et rappelons qu’Ernst Beyeler avait organisé une exposition Bonnard dans sa galerie bâloise en 1966.
F É V R I E R
VIENNE (AUTRICHE)
L'année Klimt
- Kunsthistorisches Museum - Gustav Klimt au Kunsthistorisches Museum - 14 février / 6 mai- Leopold Museum - Klimt intime - 24 février / 27 août
À l’occasion du 150e anniversaire de la naissance du peintre, Vienne célèbre en 2012 son « Année Klimt ». Le Kunsthistorisches Museum propose de découvrir un pan méconnu de son travail : les treize peintures qu’il réalisa pour les escaliers d’apparat de l’institution viennoise. Avant de devenir l’un des architectes de la Sécession, Klimt travaillait pour la Compagnie d’artistes, laquelle fut chargée en 1890 de peindre les écoinçons et les entrecolonnements séparant colonnes et voûtes, dans les escaliers du Kunsthistorisches Museum. Institution consacrée aux maîtres viennois du XXe siècle, le Leopold Museum n’est pas en reste et propose une vision plus personnelle de l’artiste. S’il détient les plus beaux tableaux de Klimt dans ses collections, le Leopold fait découvrir pour la première fois une partie des archives d’Emilie Flöge, compagne du peintre. Correspondances, photographies et cartes postales retracent les différents voyages à travers l’Europe et marquent les étapes de la vie intime de Klimt.
M A R S
PARIS
Le monde animal
Galeries nationales du Grand Palais - Beauté animale, de Dürer à Jeff Koons - 21 mars / 16 juilletL’exposition « Beauté animale, de Dürer à Jeff Koons », qui se tiendra du 21 mars au 16 juillet 2012 au Grand Palais, analyse les rapports entretenus par les artistes occidentaux avec le monde animal. Comment ont-ils choisi de le représenter ? Quelles ont été leurs espèces de prédilection ? Le parcours thématique permet de développer plusieurs approches : l’étude scientifique des animaux exotiques, le parallèle homme/singe lié aux théories darwinistes ou la conscience d’une nature menacée. Le corpus est éclectique mêlant peintures, sculptures et photographies de la Renaissance à nos jours. Parmi les artistes exposés se trouvent notamment Rembrandt, Barye, Courbet ou Louise Bourgeois, tous réunis par un parti pris original, l’absence de la figure humaine dans leurs œuvres choisies.
A V R I L
PARIS
Le désordre règne au Quai Branly
Musée du Quai Branly - Les Maîtres du désordre - 1er avril / 29 juillet« Dans la plupart des cultures, des traditions mettent en scène et parfois cherchent à équilibrer les forces contraires qui se disputent l’univers, organisent ou désorganisent les contrats sociaux […] Cette conscience du désordre semble être commune à beaucoup de civilisations et les forces perturbatrices, nécessaires à leur équilibre et à leur continuité ». Partant de ces réflexions et s’appuyant sur le livre de l’anthropologue Bertrand Hell, Les maîtres du désordre, le commissaire invité du Quai Branly Jean de Loisy convie anthropologues et artistes à semer le chaos dans l’établissement parisien des bords de Seine. Des œuvres de la collection du Quai Branly et de nombreux prêts évoquant les divinités transgressives des peuples d’Afrique, d’Océanie, des Amériques et d’Asie, y côtoient des créateurs modernes et contemporains tels Jean-Michel Basquiat ou Thomas Hirschhorn pour créer un parcours unique conçu comme un voyage, soulignant le rôle essentiel de l’artiste dans la société.
M A I
METZ
Art de guerre
Centre Pompidou-Metz - 1917 - 26 mai / 24 septembrePréfigurant le centenaire de la Grande Guerre (1914-2014), l’exposition « 1917 » questionne la création artistique en temps de conflit, à travers différents supports mais autour d’une année seulement. En 1917, la pluralité de productions culturelles témoigne de la variété des situations individuelles face au front. Quelle que soit la distance qui sépare les hommes du combat, que celle-ci soit physique ou symbolique, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin de réagir ; en témoigne notamment l’art des tranchées. Fondé sur une cartographie de l’éloignement, le parcours de l’exposition révèle plusieurs typologies d’artistes auxquelles correspondent des thèmes de représentation récurrents. Les problématiques de la destruction et de la reconstruction sont ensuite illustrées par des œuvres évoquant les blessures du corps ou du paysage, par des autoportraits, des masques aussi. Car le travestissement et le théâtre aident alors à la réparation de la société.
J U I N
Kassel (Allemagne)
dOCUMENTA (13)
Divers lieux - dOCUMENTA (13) - 9 juin / 16 septembreDu 9 juin au 16 septembre 2012, Kassel (Allemagne) accueille la treizième édition de dOCUMENTA, quinquennale allemande de l’art contemporain. Cent jours pour découvrir le travail d’une centaine d’artistes internationaux, dont Massimo Bartolini, Mario Garcia Torres, Pierre Huyghe, Emily Jacir, William Kentridge, Erkki Kurenniemi, Nalini Malani, Giuseppe Penone, Natascha Sadr Haghighian, Ian Wallace, Lawrence Weiner ou Jalal Toufic. Les travaux porteront cette année sur le thème de « L’émancipation par l’art », qu’elle soit individuelle ou collective. Ils seront exposés dans les trois sites consacrés à la manifestation : le Musée Fridericianum, le parc Karlsaue, et le Gloria Cinema. Selon le vœu de la directrice artistique de l’événement Carolyn Christov-Bakargiev, certaines œuvres seront associées à des projets dépassant le cadre des arts plastiques et impliquant divers acteurs du monde des sciences ou de la littérature.
J U I L L E T / A O Û T
GRENOBLE/QUIMPER
Die Brücke
- Musée de Grenoble - Die Brücke - 31 mars / 17 juin- Musée des beaux-arts de Quinper - Die Brücke - 11 juillet / 8 octobre
Vingt ans après la dernière exposition organisée à Paris entièrement consacrée à Die Brücke, les musées de Grenoble (Voir p. 20) et de Quimper s’associent pour représenter en France l’histoire et les principes de ce mouvement artistique allemand, initiateur de l’expressionnisme. Avec cent vingt œuvres, peintures et dessins, provenant toutes du musée de Berlin consacré au groupe, l’exposition présente le style et la sensibilité d’un art en rupture avec la société allemande, son conformisme idéologique et ses canons esthétiques. Si l’influence des primitifs et du fauvisme transparaît dans ses expressions exacerbées et ses formes tourmentées, son traitement de la couleur, lui, est unique. Il est caractéristique de cette avant-garde et présenté comme tel par les deux expositions. « Régnant en maître absolu, la couleur confère à jamais à cet univers cette vie et cette énergie que lui insufflèrent les artistes de Die Brücke ».
S E P T E M B R E
PARIS
Voyageurs et migrants
Grand Palais - Bohèmes – De Léonard de Vinci à Picasso - 24 septembre / 6 janvierMythe moderne né en Europe au XIXe siècle dans le milieu littéraire et artistique, la Bohème est, depuis une vingtaine d’années, associée à l’histoire des migrations, des nomades, des marginalités et, ainsi, comprise comme un phénomène plus large traversant les époques. Démonstration en sera faite au Grand Palais à l’automne prochain. Conçue sous la houlette de Sylvain Amic, le nouveau directeur des musées de Rouen, la manifestation retrace cette histoire singulière, de la Renaissance à l’époque moderne, en croisant les regards et les disciplines, de la peinture à la littérature en passant par la photographie ou la musique. Le visiteur rencontre les poètes Baudelaire, De Nerval, Rimbaud, les peintres Courbet, Van Gogh, Picasso, qui, chacun, incarnent l’un des visages de ces hérauts secrets et rebelles, qui témoignent du nouveau statut de l’artiste. Le parcours s’intéresse aussi à la nation tzigane et à la figure du bohémien, apparu en Occident au XVe siècle, image de liberté, d’errance et de marginalité.
O C T O B R E
PARIS
Raphaël à Rome
Musée du Louvre - Raphaël - 11 octobre / 14 janvierVingt-cinq ans après la rétrospective du Grand Palais, le Musée du Louvre se penche sur les années de maturité de Raphaël, installé à Rome, entre 1512 et 1520. Organisée en partenariat avec le Musée du Prado, qui possède, lui aussi, une riche collection d’œuvres de l’artiste, la manifestation aborde l’évolution stylistique du maître italien, toujours sous l’influence du Pérugin, mais aussi marqué par son concurrent Michel-Ange, et sa rencontre avec Léonard de Vinci, en 1510. Son atelier est largement évoqué, à travers, notamment, la confrontation de dessins préparatoires aux tableaux présentés. Pour préparer l’exposition, le Louvre a lancé fin 2008 une nouvelle étude des tableaux de Raphaël réalisée par le Centre de recherche et de restauration des musées de France. Les résultats de ces analyses qui soulignent la diversité des procédés d’exécution de l’artiste, sont restitués lors de la journée d’étude publique organisée le 25 juin, en préalable à l’exposition.
N O V E M B R E / D É C E M B R E
PARIS
Rétrospective Dalí
Centre Georges Pompidou - Dalí - 21 novembre / 1er janvierAprès « L’énigme sans fin » en 2003 au Museum Kunst Palast de Düsseldorf et « Une image peut en cacher une autre » en 2009, au Grand Palais, le commissaire Jean-Hubert Martin interroge de nouveau la symbolique des images doubles dans l’exposition « Dali ». Du 21 novembre 2012 au 1er janvier 2013, les cimaises du Centre Georges Pompidou accueillent 150 œuvres du peintre catalan, accompagnées de films et documents sonores qui permettent de mieux cerner la mythologie personnelle de l’artiste, indissociable de son travail plastique. Si un grand pan est consacré à la période surréaliste, notamment avec le tableau Les montres molles — prêt exceptionnel du MoMA pour l’occasion- ses œuvres d’après-guerre, empreintes de mysticisme, sont également à l’honneur. « Dali » est attendu comme l’événement de la fin 2012, puisque la précédente rétrospective de l’artiste, en 1979, avait accueilli 850 000 visiteurs ; un chiffre jamais égalé depuis pour une exposition temporaire au Centre Pompidou.
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Les grandes expositions 2012
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°360 du 6 janvier 2012, avec le titre suivant : Les grandes expositions 2012