PARIS
Selon un bilan peu ébruité, le récolement des 500 000 objets d’art déposés dans les administrations progresse, mais irrégulièrement. 60 000 biens restent introuvables.
En 2009, le premier rapport décennal de la Commission de récolement des dépôts d’œuvres d’art (CRDOA) faisait grand bruit : « 16 000 œuvres manquent à l’appel » titrait l’Agence France Presse. Dix ans plus tard, c’est en catimini que le deuxième rapport couvrant la période 1997-2017 a été rendu public. Le travail de cette commission créée en 1996 pour piloter le récolement des déposants (musées nationaux, Centre national des arts plastiques, manufacture de Sèvres et Mobilier national) chez les multiples dépositaires (musées en région, administrations diverses…) est titanesque : près de 500 000 objets sont concernés, dont la moitié d’assiettes ou de tasses. Elle ne vérifie pas elle-même sur le terrain la présence et l’état de conservation d’un bien déposé et inventorié, mais réconcilie les données qu’elle tente d’obtenir d’administrations plus ou moins sensibilisées. Si les musées de France ont bien intégré cette obligation, ce n’est pas le cas des milliers de petites villes, préfectures ou ambassades qui renâclent à faire ce travail.
Méfiante, la commission ne publie plus de chiffres consolidés. C’est à grand-peine que l’on arrive à constituer un état général plus ou moins exact des dépôts [voir tableau ci-dessous]. Il est cependant impossible d’avoir une idée du taux général de récolement (pourtant la raison d’être de la CRDOA). En additionnant des chiffres publiés ici et là, on parvient tout au plus à calculer qu’au moins 60 000 objets « manquent à l’appel », ; bien plus que les 16 000 recensés il y a dix ans. Cette augmentation en apparence inquiétante, témoigne en réalité d’une plus grande précision de ce « baromètre ». Ainsi la Manufacture de Sèvres – de loin le plus grand déposant – a commencé plus tardivement son travail de fourmi. Parmi les 60 000 biens recherchés, 42 000 relèvent de Sèvres, dont 29 000 dans les seules ambassades.
Car, ce qu’il faut retenir, c’est que le récolement avance. Il est supérieur à 90 % pour les musées de France qui ont achevé en 2015 leur première campagne décennale. Dans les grandes institutions (ministères, assemblées parlementaires… ) plus de 100 000 objets ont été récolés (mais on ne connaît pas le nombre de dépôts). À la présidence de la République « à tous égards, le chantier le plus lourd », il manque 1 068 biens, dont 24 déposés par les musées et 385 par le Mobilier de France ; soit tout de même près de 10 % des 12 147 biens non localisés dans l’ensemble des grandes institutions.
À l’étranger, principalement dans le réseau diplomatique, le taux de récolement est de 50 %. C’est en régions que le pointage est plus compliqué en raison de la multiplicité et de la diversité des dépositaires (préfectures, universités, villes pour elles-mêmes ou pour leur musée, cathédrales…). Si l’on a une idée plus précise des dépôts dans les musées municipaux, il n’en est pas de même des innombrables copies de portraits de Napoléon III envoyés dans les préfectures ou des tableaux religieux déposés dans les églises. Ce travail de bénédictin, dont on s’interroge parfois sur la pertinence, tant il concerne surtout des objets de faible valeur, paye parfois. Le rapport se plaît à signaler les œuvres retrouvées et restituées, comme ce tableau d’Alfred Manessier déposé en 1946 dans l’Ambassade de France à Helsinki et retrouvé sur le marché en 2017.
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Le discret rapport sur le récolement des dépôts d’œuvres d’art
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°514 du 4 janvier 2019, avec le titre suivant : Le discret rapport sur le récolement des dépôts d’œuvres d’art