La Fondation Beyeler fête ses 10 ans avec une exposition célébrant les six Décennies de la galerie éponyme. L’occasion d’un point sur l’avenir de ces structures.
RIEHEN/BÂLE - L’exposition « L’autre collection », célébrant à la fois les 60 ans de la galerie Beyeler (Bâle) et les 10 ans de la fondation éponyme, sise à Riehen près de Bâle, tient lieu d’hommage mais aussi de testament. La question que ne soulève pas cet événement, et qui pourtant se lit sur toutes les lèvres, concerne l’avenir des deux structures créées par le marchand bâlois. Depuis deux ans, Ernst Beyeler participe à la Foire de Bâle seulement par l’intermédiaire d’une vitrine de la Fondation. Fonctionnant au ralenti, la galerie vend son stock et n’effectue guère d’achats. On l’imagine difficilement survivre à la disparition de son fondateur. « La galerie est un one-man show et c’est Beyeler qui décide de tout », rappelle Oliver Wick, curator at large [curateur général] à la Fondation. « Elle sera peut-être un jour la succursale en ville de la Fondation, une vitrine », nous avait d’ailleurs confié le marchand en 2005. La messe semble dite.
L’avenir est plus rose pour la Fondation, qui compte cent trente employés et affiche cette année un budget de fonctionnement de 20 millions de francs suisses (12,1 millions d’euros). En juin, le canton de Bâle-Ville a décidé de prolonger jusqu’en décembre 2011 sa subvention annuelle de 1 865 000 francs suisses (1 132 600 euros), laquelle arrivait théoriquement à terme en octobre. Ce geste s’explique par la création en avril d’une structure opérationnelle, « Beyeler Museum AG », liée de manière contractuelle à la Fondation et destinée à en assurer le financement. « Nous sommes confiants car le Beyeler Museum AG fonctionnera au-delà du vivant d’Ernst Beyeler. Nous vivons bien à Bâle dans la culture de Christoph Merian, qui est mort voilà deux cents ans », observe Michael Koechlin, responsable des affaires culturelles au canton de Bâle-Ville.
Collection en partie aliénable
La tâche principale du sémillant Samuel Keller, qui succède à partir du 2 janvier à Christoph Vitali à la tête de la Fondation, sera donc de lever des fonds et de secouer les mentalités. « Il faut s’adapter, admet Fausto De Lorenzo, directeur administratif de la Fondation. Samuel Keller vient du marketing et doit amener des idées, de nouveaux réseaux et surtout des sponsors. » D’autant plus que les tarifs d’assurance et de transport plombent aujourd’hui les budgets d’expositions. « Beyeler, c’est un nom, mais ce n’est pas parce qu’il claque des doigts que les gens s’empressent de prêter, souligne Oliver Wick. On a dû par exemple renoncer à un Bacon dont le propriétaire voulait la même valeur d’assurance que le dernier record ! » Samuel Keller devra surtout résorber le déficit annuel s’élevant à environ 3 millions de francs suisses (1,8 million d’euros). Jusque-là, Ernst Beyeler y allait de sa poche pour combler un tiers de ce trou. Reste enfin à mettre en place un véritable budget d’acquisition. Pour l’heure, les achats s’opèrent selon le bon vouloir du marchand. Celui-ci a ainsi acquis l’an dernier un Malévitch de 1915 et, choix plus incongru cette année, une toile de Neo Rauch. Sur les quelque deux cent dix œuvres de la collection, un petit pan se révèle aliénable, sur décision du conseil d’administration de la Fondation, dans l’optique d’acheter d’autres œuvres dans la foulée.
L’ancien directeur de la Foire de Bâle aura-t-il toutefois les coudées franches pour bouger ce pétrolier, dont l’ambiance trahit une fin de règne à la roi Lear ? « Samuel Keller a encore des choses à apprendre », déclarait Beyeler en juin à l’hebdomadaire zurichois Die Weltwoche. Le patriarche ne souhaite visiblement pas perdre la main. S’il dirige le Beyeler Museum AG, dont le conseil d’administration est présidé par le banquier Georg Krayer, Samuel Keller ne figure toutefois pas au conseil d’administration de la Fondation, structure patrimoniale encore sous le contrôle de Beyeler et de huit notables bâlois.
Jusqu’au 6 janvier 2008, Fondation Beyeler, Baselstraße 101, Riehen/Bâle, tél. 41 61 645 97 00, tlj 10h-18h, www.beyeler.com
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Ernst Beyeler, son testament
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°265 du 21 septembre 2007, avec le titre suivant : Ernst Beyeler, son testament