Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Musée Matisse à Nice ou encore château des Ducs de Bretagne à Nantes, Jean-François Bodin a déjà été confronté de nombreuses fois à l’architecture muséale. En charge du réaménagement du Musée national d’art moderne, il s’explique sur son intervention, marquée par une « franche modestie ».
Le chantier du Centre Georges Pompidou est très fractionné. Vous avez réaménagé les espaces du Musée national d’art moderne (Mnam), de la Bibliothèque publique d’information, d’une façon très discrète. N’est-ce pas un peu frustrant ?
Ce n’est pas plus frustrant que d’intervenir dans un monument classé, comme le château des Ducs de Bretagne. L’esthétique du bâtiment tient très bien toute seule ; je n’imagine pas la nécessité de marquer une intervention. Mon propos tient en deux points : donner des possibilités à l’accrochage des œuvres, et offrir des salles et des dispositifs de lecture. Comme le prouve les agencements du niveau 5, le bâtiment ne peut pas être dissimulé ; l’écriture de Piano et Rogers est forte, omniprésente. Un bâtiment sur lequel vous intervenez avec brutalité vous la renvoie dans la figure. Il faut l’accompagner. Comprendre comment a été pensé le Centre Georges Pompidou a été passionnant ; sa construction est d’un très grand raffinement. Pour moi, il y a certaines constantes à suivre dans l’architecture fonctionnelle d’un musée, comme la mise en place de parcours naturels. Un musée n’est pas un lieu bavard pour l’architecte. Les œuvres doivent y être vues en premier, le contact avec elles est primordial. Certaines dispositions peuvent complètement perturber le visiteur, alors que c’est son confort qui importe.
Plus précisément, comment appliquez-vous ces considérations à un musée d’art moderne et contemporain ?
Il est impossible de connaître l’utilisation future d’un musée d’art moderne, et à plus forte raison d’art contemporain, d’où la nécessité d’y mettre en place des dispositifs assez souples, évolutifs en fonction des collections, des thèmes et des moments. D’un conservateur à l’autre, la lecture des collections varie beaucoup, et le renouvellement des conservateurs va plus vite que le renouvellement des aménagements. Au Centre Georges Pompidou, il fallait donner un maximum de cimaises, une bonne qualité de circulation, et une variété des espaces équivalente à celle des pièces conservées, tout en gardant une écriture extrêmement simple. D’une façon semblable, lors du réaménagement du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, nous avons fait le choix de la générosité des espaces, de bons enchaînements, et surtout d’une très bonne qualité dans la construction. Un musée n’est pas une institution riche pour son fonctionnement ; une fois son établissement ou une première grande rénovation payés par la collectivité, c’est fini, il n’y a plus de budget.
Aviez-vous la collection du musée à l’esprit lorsque vous travailliez ?
Effectivement, je connais bien les collections du Mnam, mais dans les espaces consacrés aux œuvres modernes, notre intervention est d’une franche modestie. Nous nous redéployons dans des structures existantes, très peu modifiées. Le travail, surtout pour l’étage réservé au contemporain, s’est fait en collaboration avec les conservateurs. J’avais déjà eu des expériences professionnelles avec eux, chacun connaissait les pratiques de l’autre. Un musée ne se fait pas d’une manière isolée. Même si nous n’avons pas à intervenir dans son utilisation, nous devons quand même en être informés. Il y a quelques exemples de musées où conservateurs et architectes ont été en lutte. Généralement, le résultat final en pâtit.
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Entretien avec Jean-François Bodin
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°87 du 27 août 1999, avec le titre suivant : Entretien avec Jean-François Bodin