L’antiquaire parisien, Christian Barville, contraint par des difficultés économiques à mettre son stock à l’encan, suspecte des commissaires-priseurs et experts d’avoir usé de sa faiblesse pour disperser sa marchandise à faible prix. Les œuvres auraient été par la suite revendues dans de meilleures conditions.
PARIS - Un peu plus de deux ans après l’éclatement du scandale des commissionnaires de Drouot où quelques commissaires-priseurs ont également été mis en examen, une nouvelle affaire touchant plusieurs professionnels du célèbre hôtel des ventes parisien, va-t-elle de nouveau mettre à mal le marché de l’art ? C’est ce qu’a révélé le site de presse Mediapart.fr, dans un article publié le 8 avril. Fin mars, Christian Barville, antiquaire parisien en chambre, a déposé plainte contre X avec constitution de partie civile pour extorsion en bande organisée, escroquerie en bande organisée, escroquerie par une personne dépositaire de l’autorité publique, recel d’escroquerie, association de malfaiteurs, entrave à la liberté des enchères publiques, abus de confiance, blanchiment et prise illégale d’intérêts. Cette affaire qui vise deux commissaires-priseurs de Drouot (dont un judiciaire) et plusieurs experts en tableaux et mobiliers XIXe, va être confiée à un juge d’instruction du pôle financier du tribunal de grande instance de Paris. Le plaignant a aussi saisi, en début d’année, le commissaire du gouvernement, Michel Seurin, magistrat du parquet placé auprès du Conseil des ventes volontaires pour recevoir et instruire des plaintes.
De la faillite à l’expulsion
En 2008, Christian Barville est lâché par son associé après que ce dernier a perdu de l’argent à la Bourse. Il connaît des difficultés financières qui le poussent à vendre une partie de son stock en ventes publiques. Pour cela, il fait appel à un commissaire-priseur dont les parents et les siens se fréquentaient, ce qui lui inspire confiance. Le commissaire-priseur qui s’était occupé de la succession du père de l’antiquaire en 2006, le dépanne à plusieurs reprises d’avances sur ventes. Mais une série de « complications » va aggraver sa situation économique au point de conduire à son expulsion, à l’automne 2009, d’un logement qu’il occupait depuis vingt ans, alors que la valeur de son patrimoine mobilier dépasse largement le montant de ses créances. La faute à pas de chance ? « Pas vraiment », rétorque son avocat Me Arnaud Claret qui parle de « coïncidences plus que troublantes en matière de délais de paiement et d’évolution de prix des œuvres » et critique « l’attitude de professionnels envers un homme économiquement affaibli et en situation de dépendance ». En juillet 2009 par exemple, sur demande d’un créancier, un commissaire-priseur judiciaire saisit près de 250 tableaux, soit plus de la moitié du stock de Christian Barville, pour honorer une dette d’environ 10 000 euros. Dans le lot se trouve un portrait de jeune femme peint par Élisabeth Vigée-Lebrun couvrant largement à lui seul le montant réclamé (adjugé 58 000 euros en avril 2010). Le commissaire-priseur judiciaire met étrangement plus de six mois pour fixer précisément la somme globale due par l’antiquaire et pour lui rendre les tableaux après règlement de celle-ci. Christian Barville remarque aussi que les tableaux qu’il met volontairement en ventes publiques ne sont pas correctement décrits et estimés par les experts. Non seulement ils se vendent mal, mais encore nombre sont revendus, souvent par les mêmes experts sous des attributions bien plus flatteuses, quelques mois plus tard en salles de ventes à des prix doublés, triplés, voire plus. Il y voit un système d’entente bien organisé où des œuvres sont bradées pour pouvoir être revendues avec des perspectives de plus-values à court terme. Une enquête devra le déterminer. « Je sais qu’ils veulent me faire passer pour un illuminé parano qui a raté ses ventes, lance Christian Barville. Mais la vérité est ailleurs ». À suivre donc…
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Drouot : un antiquaire victime de malversations ?
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Abonnez-vous dès 1 €Élisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842) - "Madame Vigée-Lebrun et sa fille" (1789) - Musée du Louvre - Paris - source Wikimedia
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°368 du 27 avril 2012, avec le titre suivant : Drouot : un antiquaire victime de malversations ?