Il le dit lui-même « tout est art ». Il, c’est Ben, reconnu comme véritable artiste par ses aficionados, ou fantaisiste usurpateur pour ses détracteurs. Il s’exprime surtout à travers les mots, qu’il aime inscrire partout et n’importe où, et qu’il manie habilement, comme un puzzle, pas nécessairement constitué de pensées profondes. Quoi qu’il en soit, ce sont les bus de Reims qui prêtent leurs flancs à son dernier jeu de « questions-réponses ».
L’initiateur de ce projet est l’agence Euro RSCG Communicance, et en particulier Alain Laudeloux qui porte un intérêt personnel à Ben depuis plus de vingt ans. À l’occasion de leur rencontre au printemps dernier, Ben lance le bouchon et se dit prêt à s’investir dans une opération qui allierait la Ville de Reims et la publicité, à laquelle il n’est pas insensible. L’agence saute sur l’occasion et réfléchit à une idée qui corresponde au travail et à l’histoire de Ben. Celui-ci aime, d’une part, les choses qui bougent, d’autre part, s’adresser au grand public. Heureux concours de circonstances, la société des Transports urbains de Reims (TUR) est un client de l’agence. Or, quoi de plus vivant et de plus proche des gens de la rue que les autobus ? Le client est d’accord à 100 %, et la manifestation peut être montée grâce à ces deux partenaires mécènes, car il n’y a dans cet événement aucune affaire de gros sous, chaque intervenant officiant gracieusement dans son domaine. Seul Ben, qui n’a pas perçu de rémunération pour cette commande, a reçu l’engagement qu’une de ses œuvres serait achetée (50 à 60 000 francs, prix moyen).
Si ce type d’action est une première – mais pas la dernière – pour l’agence, spécialisée dans la communication “d’enseignes”, il n’en est pas de même pour les Transports urbains de Reims, qui mènent depuis une douzaine d’années une politique culturelle très active. Dès 1986, ils n’hésitent pas à demander à Buren d’intervenir sur l’ensemble de leur réseau. Ils sont commanditaires de photographes lors de chaque édition du “Mai de la Photo”, etc. Bref, un terrain d’entente idéal pour les trois protagonistes. Euro RSCG Communicance y voit le moyen de promouvoir la création en sortant l’art de son contexte habituel ; les TUR y trouvent l’opportunité d’animer et de mettre un peu de piment dans les rues un peu trop “sages” de la ville. Quant à Ben, il a accepté parce qu’il “n’aime pas l’idée d’une œuvre d’art accrochée à un mur, presque décoratifs... “Au départ, une œuvre d’art est une liberté, quelque chose qui dérange ou devrait déranger. Chez moi, c’est plutôt une démangeaison, une envie de dire les choses. C’est pourquoi, lorsque Reims me propose ce travail sur les bus, je dis oui parce qu’il va y avoir communication. L’idée des bus m’a plu parce que ce ne sont pas des collectionneurs, ni des habitués de l’art contemporain qui voient passer les bus, mais Monsieur et Madame “tout le monde”. Dialoguer avec ce public me plaît. J’ai toujours préféré les galeries ayant des vitrines dans la rue...”
Ce sont donc les cent cinquante autobus du district qui offrent, du 4 au 17 mars, leurs quatre faces (soit environ six cents espaces d’affichage) aux questions-réponses de Ben, dont certaines spécifiques à la ville, lui permettant de se faire connaître du plus grand nombre de Rémois, à charge pour eux de découvrir cet artiste provocateur. Parallèlement et jusqu’au 28 mars, la galerie d’exposition permanente des TUR propose de voir une “installation de Ben sur le temps” et l’ancien collège des Jésuites accueille ses travaux sur le thème de “l’art parle de l’art”.
Diverses occasions pour les habitants de Reims et de sa région d’aller à l’encontre de cet art contemporain, sujet à controverses. Sans doute une révélation pour certains, une recherche de l’art perdu pour d’autres...
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Ben, y es-tu ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°77 du 19 février 1999, avec le titre suivant : Ben, y es-tu ?