Depuis 1993, l’État français peut assurer les œuvres empruntées par les établissements publics nationaux dans le cadre d’expositions temporaires, de manière à en alléger le budget. Des discussions sont en cours actuellement au Gouvernement pour étendre le bénéfice de cette garantie d'État sans pour autant en faire profiter les musées territoriaux.
L’assurance des expositions temporaires d’œuvres d’art demeure un sujet crucial, en raison de leur coût important dans le budget de celles-ci. Les chiffres régulièrement avancés oscillent entre 20 et 40 % du budget total de ces expositions. S’inspirant de législations étrangères, un mécanisme de garantie étatique des risques encourus par les œuvres empruntées lors de leur exposition temporaire, dès lors que celles-ci n’appartiennent pas à l’État, a été mis en place en 1993. L’objectif poursuivi était d’alléger ce coût extrêmement élevé. Cependant, le champ d’application restreint de ce mécanisme, dénoncé dès son adoption, nécessite aujourd’hui une adaptation.
La garantie de l’État, dite de « clou à clou », ne peut être accordée qu’au terme d’un arrêté du ministre chargé du budget, au seul profit d’un établissement public national et pour une exposition temporaire déterminée. Cet arrêté est pris après avis consultatif d’une commission d’agrément. Ainsi, au-delà d’un seuil de valeur agréée des œuvres n’appartenant pas à l’État, fixé à 300 millions de francs (plus de 45 millions d’euros), ce dernier a vocation à couvrir les éventuels dommages qui pourraient advenir aux œuvres prêtées. Plusieurs arguments ont été soulevés par les différents gouvernements qui se sont succédé à l’encontre de toute velléité de réforme. Il fallait ainsi protéger l’intérêt réciproque de l’État et du marché privé des assurances, éviter des risques financiers excessifs et prendre en considération le fait que l’État ne dispose pas toujours des moyens de vérifier le respect des conditions de sécurité par les collectivités territoriales.
En l’état, cette loi ne peut être étendue aux expositions des collectivités territoriales. Dès lors même les établissements publics de coopération culturelle, créés par la loi du 4 janvier 2002, s’avèrent exclus du champ d’application. Ainsi, tant le Louvre-Lens que le Centre Pompidou-Metz ne peuvent bénéficier de ce dispositif. Or, l’absence d’extension de ce mécanisme à ces musées grève nécessairement leur budget et s’avère ainsi contraire à l’objectif de promotion de la circulation des œuvres d’art sur l’ensemble du territoire national.
Une extension limitée aux coproductions avec l’État
Dans sa réponse du 10 décembre dernier à la question du député PS du Pas-de-Calais, Guy Delcourt, la ministre de la Culture a indiqué souhaiter une évolution du régime de la garantie de l’État. Cependant, la réponse étonne en ce qu’elle semble limiter cette extension aux « coproductions entre l’État et les collectivités territoriales ». Le ministère réfléchirait cependant également à d’autres dispositifs, « comme l’extension du système de dispense d’assurance pour le prêt d’œuvres appartenant aux collections nationales », à rebours ainsi des propositions du rapport d’Alain Seban remis en mai 2013. La première proposition prévoyait, en effet, une dispense pour les prêts de longue durée, proches de la limite d’un an, et non pour les expositions temporaires. Si l’abaissement du seuil de valeur agréée n’a pas été encore publiquement abordé, les discussions actuelles entre les ministères du Budget et de la Culture devraient a priori peu retoucher le mécanisme actuel.
Pour autant, si ces seules mesures sont décidées, elles laisseraient toujours à la charge des musées appartenant aux collectivités territoriales (la majorité des musées) les coûts d’assurance pour les œuvres prêtées par d’autres collectivités territoriales, des collectionneurs privés ou des musées étrangers. Il existerait donc toujours un déséquilibre entre musées nationaux et musées territoriaux. Une évolution vers le système du Government Indemnity Scheme anglais, sans franchise et bénéficiant également à certaines institutions privées, est loin d’être à l’ordre du jour.
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Assurance : les timides avancées de la garantie de l’État
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Abonnez-vous dès 1 €Vue de l'exposition « Decorum, Tapis et tapisseries d’artistes » au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. © Photo : R.Chipault et B. Soligny.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°406 du 31 janvier 2014, avec le titre suivant : Assurance : les timides avancées de la garantie de l’État