La Fondation Giacometti confie au marchand américain Larry Gagosian la vente de cent onze bronzes estimés autour de 45 millions d’euros.
PARIS - Que la Fondation Alberto-et-Annette-Giacometti dispose d’œuvres à vendre n’est un secret pour personne. Depuis trois ans, cette structure, dont le budget de fonctionnement s’élève à 1,2 million d’euros, a cédé trois sculptures de Giacometti par l’intermédiaire d’un courtier. Œuvrant jusqu’à présent en solo, elle a décidé de s’adjoindre l’aide d’un professionnel. Pas n’importe lequel, puisqu’après six mois de discussions avec des marchands français, britanniques et américains, son choix s’est porté sur le puissant Larry Gagosian. La Fondation lui a confié en juin la vente des œuvres aliénables de son fonds, soit cent onze bronzes d’une valeur d’environ 45 millions d’euros (1). « Nous ne vivons pas d’une quelconque subvention, mais de l’argent que nous avons investi et de la vente des œuvres. Si nous n’avons pas une vision à long terme, ce capital va fondre, défend Véronique Wiesinger, directrice de la Fondation. Nous avons besoin d’un bras armé commercial, capable de promouvoir les œuvres de Giacometti et de relayer auprès des collectionneurs les informations que nous diffusons par ailleurs à tous les marchands. Nous avons aussi besoin de quelqu’un qui soutienne la cote de l’artiste en vente publique. » Jusqu’à présent, cette dernière est on ne peut plus erratique. En août 2005, une Tête du colonel Henri Rol-Tanguy s’est contentée de 35 000 dollars (28 500 euros) chez Barridoff Gallery à Portland (Oregon). Une autre édition de cette Tête a en revanche obtenu 192 000 dollars chez Sotheby’s à New York en novembre de la même année. Cherchez l’erreur ! « Le travail de délivrance de certificat par le comité n’est pas assez connu. Il n’y a pas encore de visibilité très claire sur la quantité de fontes faites ou à faire », explique Véronique Wiesinger. Or la galerie Gagosian, dont l’écurie compte d’autres grands sculpteurs du XXe siècle comme Picasso, Richard Serra ou David Smith, n’a pas son pareil pour gonfler les prix. « Nous avons un grand fichier que nous pouvons alerter quand une œuvre passe en vente, nous a indiqué John Good, directeur de la galerie Gagosian à New York. On ne peut contrôler le marché, mais l’encourager en plaçant correctement les pièces. Nous n’allons pas nous presser, mais travailler sur le long terme. » Même son de cloche du côté de Véronique Wiesinger : « On ne veut pas booster artificiellement la cote de l’artiste, mais que celle-ci reflète la réalité d’une création qui est rare, car certaines éditions sont épuisées ou se trouvent dans des collections publiques, précise-t-elle. Notre choix avec Larry est de privilégier les musées. Pour nous, l’opération de référence reste ce qu’Annette a fait avec le Louisiana Museum au Danemark. Elle leur a vendu, de 1972 à 1992, de très belles fontes, de sorte que ce musée possède aujourd’hui l’un des plus beaux ensembles au monde. » L’idée est aussi de dépoussiérer l’image du sculpteur en l’associant aux plus jeunes artistes de la galerie. Gagosian avait, à cet effet, intégré Giacometti en 2004 dans une exposition baptisée « What’s Modern ? ». Il y côtoyait notamment Damien Hirst et Jeff Koons. La promiscuité avec le contemporain tire parfois vers le haut les prix du moderne…
(1) La galerie Gagosian n’intervient pas dans la chasse gardée scientifique de la Fondation, à savoir la délivrance de certificat et le travail du catalogue raisonné.
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Alberto Giacometti rentre chez Gagosian
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°243 du 22 septembre 2006, avec le titre suivant : Alberto Giacometti rentre chez Gagosian