Vingt ans de recherches

En ces temps troubles où le moindre produit se doit de trouver immédiatement sa clientèle, où les éditeurs d’art préfèrent désormais publier quelques livres consacrés au style provençal et aux plus beaux paysages d’Italie, le Kazimir Malewicz de chez Adam Biro constitue une exception remarquable. Ce luxueux ouvrage n’est ni plus ni moins le catalogue raisonné de l’œuvre de Malévitch. Autant dire que nous sommes face à un projet monumental et un pari risqué résultant d’un très long travail universitaire. C’est en 1973 que l’auteur, Andréi Nakov, débute ses premières recherches. Depuis, il n’a cessé de parcourir l’Europe et l’Union soviétique découvrant ici des archives inconnues, recensant là des œuvres qui depuis longtemps sommeillaient dans des réserves ou d’obscures collections. Le résultat de ce travail de titan tient pour l’instant en quatre cent quarante-huit pages. Après une longue introduction qui narre les détails de cette recherche, l’auteur nous entraîne dans le catalogue raisonné même. Chaque peinture, chaque dessin (reproduit en noir et blanc) est accompagné de son titre, de sa date d’exécution, de sa technique, de son support, de ses dimensions, de ses références et de son lieu de conservation. Plus de mille œuvres sont ainsi classées par ordre chronologique ou par technique. Surtout, cet ouvrage unique permet de comprendre visuellement la genèse du suprématisme et de voir comment Malévitch passe du cubo-futurisme à un système de représentation révolutionnaire ou les plans et les motifs disparaissent pour une vision unifiée de l’espace. Non moins surprenantes sont les dernières œuvres des années 1930, où Malévitch revient alors à une figuration centrée sur la représentation humaine. Kazimir Malewicz est donc un ouvrage unique même si la qualité des reproductions n’est pas à la hauteur du projet. Mais Adam Biro prépare déjà un second tome où une large sélection d’œuvres sera en couleur.