CHELLES (SEINE-ET-MARNE) [05.06.15] – La menace planait depuis un certain temps. Le Journal des Arts en a eu la confirmation : le centre d’art de Chelles va fermer et le personnel des Eglises quittera ses fonctions au 31 août.
Depuis plusieurs mois, le nom de Chelles était associé à ceux de Montpellier, Brétigny-sur-Orge ou Quimper, autres centres d’art « en danger », dans un secteur culturel que les effets de la crise ont mis du temps à atteindre. En janvier dernier, la municipalité de Chelles (Seine-et-Marne) avait envisagé la fermeture du centre d’art des « Eglises », puis fait machine arrière devant l’émotion du secteur artistique et des acteurs éducatifs de la ville.
Cinq mois plus tard, les discussions avec les autres financeurs du lieu (DRAC, région, département) n’ont pas abouti et les nouvelles sources de financement évoquées (mécénat, entrées payantes) n’auront pas le temps d’être testées. Les Eglises fermeront à la fin de l’été. Ce lieu atypique, créé en 2001 dans le cadre d’une commande publique n’est pas un centre d’art conventionné financé par l’état, dont la dotation (DRAC) n’excède pas 10 000 euros, tandis que la mairie apporte plus de 300 000 euros par an (80 % du budget). Sept personnes composent encore l’équipe (un poste a déjà été non-renouvelé cette année). Quatre contrats temporaires se termineront fin août. Pour les titulaires, des négociations de reclassement sont en cours.
Le centre d’art accueille en moyenne 7000 visiteurs par an, dont près de 70 % habitent la ville. Le chiffre peut sembler modeste. Mais dans une zone périphérique lointaine, où 60 % de la population travaille loin, part tôt et revient tard, l’offre culturelle mince impose une lecture différente. D’une part, les 14 écoles de la ville ont un partenariat avec le centre, pour des échanges allant au-delà des simples visites guidées (ateliers, débats, pratique artistique). « A raison de 5 000 visites scolaires par an depuis une dizaine d’années, on imagine sur une commune moyenne l’impact éducatif du lieu », explique-t-on à la DRAC Île de France, qui confirme que « Chelles est dans la bonne moyenne des centres d’art municipaux, en terme de fréquentation mais aussi en terme d’ouverture aux publics éloignés, certains quartiers de Chelles constituant de véritables défis en terme d’accès à la culture ». D’autre part, les Eglises jouent un rôle social utile, en étant la seule institution culturelle ouverte du lundi au dimanche. Ouvertes à tous les médias contemporains (peinture, photo, sculpture, installation, vidéo) les Eglises ont été créés puis dirigées par Eric Degoutte jusqu’en septembre dernier, quand ce dernier est parti au FRAC Centre. Le centre d’art est partenaire du réseau TRAM (Territoire région art médiation) et participe à ce titre à l’actuelle biennale « Hospitalités n°5 », où il présente une série d’installation du duo d’artistes Nøne Futbol Club. La suite de la programmation est inconnue, et pour cause.
Au printemps 2014, la campagne pour les municipales avait focalisé le débat budgétaire sur le centre d’art. Après la poussée du Front national et la victoire surprise de la droite dans ce territoire socialiste, le nouveau maire (UMP) avait rapidement annoncé son intention de diminuer les dépenses liées à l’activité du centre. Comme souvent, le soutien à la création a revêtu une importance symbolique, qu’un élu peut décider de sacraliser ou d’attaquer selon le message politique qu’il désire envoyer à son électorat. Et le message politique envoyé la semaine dernière est clair : après un conseil municipal que nos confrères du Parisien ont décrit comme plus que houleux, la nouvelle majorité a justifié une coupe nette dans les dépenses par une situation budgétaire « catastrophique » qu’aurait laissée la majorité précédente – ce qui ne l’a pas empêché de voter l’installation d’un nouveau réseau de caméras de surveillances pour 1,25 million d’euros.
Ce nouvel épisode d’un centre d’art enjeu de la politique locale, rappelle une donnée importante : pour éviter ce type d’arbitrage où les centres d’art sont instrumentalisés, il faut une généralisation de contrats d’objectifs clairs. C’est déjà le cas pour certains lieux conventionnés, dont les signataires s’engagent à des critères qualitatifs (variété, liberté de la programmation) mais aussi quantitatifs : financement équilibré d’artistes jeunes et confirmés, pourcentage de la masse salariale lié à la médiation, voire dans certains cas la fréquentation.
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Le Centre d’art de Chelles va fermer
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Abonnez-vous dès 1 €Les églises jumelles Sainte-Croix et Saint-Georges, Chelles © Photo Tangopaso - 2010 - Sous Licence Domaine public via Wikimedia Commons