Raoul Hausmann photographe

Pourtant, dès 1931, Raoul Hausmann se considère comme un photographe. Publications de l’entre-deux-guerres, expositions à Zurich, à Amsterdam et rétrospective à Prague en 1937 participent à sa notoriété. La guerre, l’installation à Limoges, des problèmes de vue le détourneront de la pratique du médium. Hors des radars des institutions françaises, son nom tombera dans l’oubli excepté auprès d’artistes tels László Moholy-Nagy, l’ami indéfectible, ou Claude Viallat, qui participera à la sauvegarde de l’œuvre. Les recherches menées par l’historienne de l’art Cécile Bargues sur Hausmann après Dada amènent à remettre au grand jour une photographie qui, de 1927 à 1936, affirme sa vision. De 1927 à l’accession d’Hitler au pouvoir, il y a les photographies produites dans, ou depuis, l’appartement du photographe à Berlin et celles réalisées au bord de la Baltique ou de la mer du Nord. Les portraits de sa première femme ou de son amante, Vera, le plan sur une main en train de coudre, renvoient à l’influence des Constructivistes, à la Nouvelle Vision aussi. Les photographies de Vera au bord de la mer, de plantes ou de paysages sont loin de la montée du nazisme qui menace l’artiste, treizième sur la liste des « artistes dégénérés ». Ces photographes opposent à la violence une atemporalité et une dialectique des formes d’une grande sérénité. L’exil à Ibiza de 1933 à 1936, la découverte de l’architecture vernaculaire de l’intérieur de l’île et de ses habitants l’engagent à une autre photographie. Hausmann se qualifie alors d’architecte. L’arrivée de Franco marquera le début d’un nouvel exil. La cinquantaine de vintages témoigne de la capacité de l’artiste à se réinventer. Et les tirages, du grand développeur qu’il fut.