Daguerréotype, dessin photogénique, positif direct, calotype, ambrotype, cliché-verre, etc., à peine la photographie est-elle apparue qu’elle a fait l’objet de toutes sortes de recherches techniques lui permettant de s’imposer comme un moyen d’expression à part entière.
Au fil du temps, l’utilisation de matériaux les plus divers : papiers salés, albuminés, gélatino-chlorure d’argent, collodion, bromure, platine, etc., ont permis aux artistes de doter la photographie d’une incroyable production d’images variées. Si celle-ci s’est tout d’abord développée en marge des débats artistiques se consacrant aux genres quasi exclusifs du portrait et du paysage, celle-là connaît à la fin du XIXe siècle certaines transformations au regard notamment du sens de l’image et de la question de la représentation. Les influences conjuguées de l’impressionnisme, du naturalisme et du symbolisme participent à fonder un style photographique, le pictorialisme, qui est proche des préoccupations plastiques de ces mouvements et sanctionne le premier rapprochement véritable entre beaux-arts et photographie. Cette tendance tournée vers les valeurs formelles de l’image est notamment caractérisée par l’adoption de tons chauds et flous ainsi que de thèmes d’inspiration volontiers académique, dont la figure de nu. Si l’Anglais Peter Henry Emerson, le Français Robert Demachy et l’Américain Edward Steichen comptent parmi les instigateurs les plus importants de cette forme photographique, Alfred Stieglitz aux États-Unis, au sein du groupe Photo-Sécession et de la revue Camera Work, la renouvellera au début du XXe en écho aux innovations picturales émergeantes que sont le fauvisme, le futurisme et le cubisme. À la préoccupation de texture fera suite celle de construction.
Ainsi la photographie se fait-elle de plus en plus « créative », comme le corroborent les recherches que développent en ce domaine les artistes de Dada. L’invention du photomontage en est l’une des meilleures illustrations. La remise en question qu’elle induit du statut de l’image dans son unité plastique et ce qu’elle suppose des possibles manipulations du médium lui-même sont autant de signes avant-coureurs d’une puissante révolution. L’usage qu’en font des artistes comme Raoul Haussmann ou John Heartfield – impliquant la photographie sur le terrain d’une revendication politique – préfigurent notamment l’aventure de ce que la fin du siècle qualifiera de « photographie plasticienne ».
Il en sera de même avec les surréalistes qui en systématiseront la pratique pour ce qu’elle leur permet de révéler au regard – au sens propre du mot – des visions inattendues et cachées. Dans cette qualité-là de fabrication d’images inédites, Man Ray ne se privera d’aucun moyen technique élaboré, recourant au principe de la radiographie pour faire rendre aux objets leur substantifique présence, et Max Ernst multipliera les compositions hybrides prévenant par là l’un des caractères dominants de la création contemporaine. Dès lors la photographie, sortie du ghetto de la prise de vue réduite au clic clac le plus basique, gagnera ses lettres de noblesse artistiques pour devenir un partenaire à part entière des « beaux-arts » aux côtés de l’architecture, de la peinture et de la sculpture.
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Photographie et arts plastiques
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°551 du 1 octobre 2003, avec le titre suivant : Photographie et arts plastiques