Collection

Nicolas Poussin : La Mort de Chioné

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 18 avril 2016 - 444 mots

LYON

Avec l’acquisition d’un second tableau de Nicolas Poussin, le Musée des beaux-arts de Lyon récidive l’exploit retentissant de 2007.

Nicolas Poussin (1594-1665), La Mort de Chioné, huile sur toile, 109,5 x 159,5 cm, Lyon, musée des Beaux-Arts de Lyon © Lyon MBA – Photo Alain Basset
Nicolas Poussin (1594-1665), La Mort de Chioné, huile sur toile, 109,5 x 159,5 cm, Lyon, musée des Beaux-Arts de Lyon
© Lyon MBA / Photo Alain Basset

Triangle noir
Notre confrère du Monde Philippe Dagen a malicieusement relevé que Poussin avait placé le sexe de l’infortunée au centre exact de la composition. Une « indécence logique », selon lui, au regard de l’histoire de Chioné et de ses amants. Ajoutons que Poussin fait ici preuve d’une audace juvénile et par là même annonciatrice de son immense carrière.

1622
Le chef-d’œuvre de jeunesse de Nicolas Poussin fut peint en 1622 alors que le peintre, âgé de 28 ans, séjournait à Lyon, ville-étape sur la route de Rome, sa destination finale.

Lyon
La formation de Poussin est fort mal documentée si bien que l’acquisition de La Mort de Chioné, un tableau précoce peint avant son installation à Rome en 1624, constitue un enrichissement exceptionnel. Celui-ci renseigne sur la « première manière » de Poussin, que seule auparavant La Mort de la Vierge (découverte en 2000 dans une petite église de Belgique) pouvait illustrer. La découverte de documents d’archives inédits
a permis de certifier la provenance lyonnaise du tableau ainsi que le nom du commanditaire : « M. Reynon », sans doute Silvio Il Reynon, soyeux d’origine milanaise installé à Lyon depuis 1613. Auprès de ce dernier, Poussin a contracté des dettes dont il s’acquitte en peignant plusieurs tableaux dont La Mort de Chioné qui figure en 1691 à l’inventaire de la descendance de son créancier avec quatre autres tableaux du maître. Cette collection, dont on mesure maintenant l’importance, hisse les Reynon aux côtés des principaux amateurs français de Poussin au XVIIe siècle. 

3 750 000 €
L’État, la ville et la région ont apporté 900 000 euros auxquels se sont ajoutés les 2 750 000 € du Club du Musée Saint-Pierre qui avait déjà permis, en 2007, d’acheter La Fuite en Égypte. Avec ce second Poussin, acquis auprès de la Galerie Jean-Luc Baroni (Londres), le musée de Lyon fait son entrée dans le club très fermé des musées français possédant au moins deux tableaux du peintre. 

Chioné
Le drame est tiré des Métamorphoses d’Ovide. Chioné, fille de Dédalion, séduit Apollon et Mercure dont elle aura des jumeaux, nés ensemble mais de pères différents. Cette naissance prodigieuse grise la jeune femme qui se vante alors d’être plus belle que Diane, laquelle se venge en décochant une flèche dans la bouche de sa rivale pour faire taire définitivement la rumeur. La silhouette ailée fuyant vers le lointain est celle de Dédalion changé en épervier par Apollon pour lui éviter de périr alors qu’il se précipite du sommet
du Parnasse pour rejoindre sa fille dans la mort.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°690 du 1 mai 2016, avec le titre suivant : Nicolas Poussin : La Mort de Chioné

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