QATAR
« Profitez d’une expérience inoubliable », clame le prospectus du Musée Sheikh Faisal Bin Qassim Al Thani.
En effet, l’expérience est vraiment inoubliable. Situé à une trentaine de kilomètres du centre de Doha, en plein désert, ce musée privé est un gigantesque cabinet de curiosités comme on n’en a jamais vu. Son propriétaire, un membre de la principale famille qui gouverne le Qatar, est un homme d’affaires fortuné (comme toute la famille Al Thani) qui a employé une partie de son argent à acheter de tout, et en grand nombre. Et plutôt que d’entreposer cette accumulation d’objets dans ses palais ou dans des réserves, il a fait construire trois immenses galeries aussi étendues qu’un hall d’aéroport, dans ce qui ressemble vaguement à une forteresse, pour y déposer sa collection et l’ouvrir à la visite.En guise de scénographie, un vaste capharnaüm où les objets sont empilés et alignés. On trouve ainsi des dizaines d’uniformes militaires de tous les pays (dont un costume de samouraï), des tenues diverses portées par des mannequins plus ou moins mis en situation, des armes, des animaux empaillés, des centaines de vitrines avec des objets ou bibelots de toutes sortes et, partout, des tapis. Sans doute privé de jouets dans son enfance, le Sheikh a acheté des centaines de petites voitures d’enfant et, pour faire bonne mesure, il a aussi acheté 600 vraies voitures de collection, de vieux bateaux à voiles et même un avion. Le tout (ou presque) étant aligné dans un joyeux bazar sur lequel on ne sait où poser les yeux. Il a aussi fait reconstituer des intérieurs de maisons arabes avec du mobilier ancien et des objets précieux, mais aussi, dans un œcuménisme inattendu, des intérieurs d’une maison de chrétiens orthodoxes et même d’une maison juive. Pour l’art européen ? Que dire ? Est-il à court d’argent? Impossible. Mal conseillé ? C’est plus probable. À moins que ce soit une légère faute de goût, puisqu’il a fait accrocher sur les murs des dizaines de reproductions (de mauvaise qualité) de tableaux européens. Le Sheikh aime se mettre en scène, et les murs, quand ils ne sont pas habillés de copies de Manet, sont recouverts de photos de lui et de sa famille, en compagnie d’anciens ou actuels dirigeants de la région, Saddam Hussein, Erdoğan, etc. Le lieu existe depuis plusieurs années, mais l’agence qui gère les musées qataris en fait peu la promotion. Elle a tort, ce lieu est réellement inoubliable.
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La plus grande caverne d’Ali Baba du monde
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°752 du 1 mars 2022, avec le titre suivant : La plus grande caverne d’Ali Baba du monde