Donations révocables

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 16 juin 2015 - 305 mots

Le rythme d’enrichissement des collections publiques a fortement baissé en valeur en 2014 et pas seulement en raison des contraintes budgétaires publiques. Les donations ont été particulièrement faibles l’an dernier comme le montre le dossier que nous consacrons à ce sujet dans cette édition. Le tour de passe-passe auquel vient de se livrer le Musée Guimet et que LeJournaldesArts.fr a révélé il y a quelques jours, ne va pas arranger la situation. En 1999 et 2000, l’antiquaire Christian Deydier, puis l’homme d’affaires François Pinault donnent tous deux au Musée Guimet des objets archéologiques chinois en or. Mais en mai dernier, l’État a convaincu les deux donateurs d’annuler cette cession et de rendre les objets à la Chine, quelques jours avant un voyage officiel à Pékin de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères. S’il est avéré que ces objets vieux de 2 000 ans sont le fruit de pillages récents, il est normal qu’ils reviennent à la Chine. Le problème est que cette restitution de biens culturels appartenant aux collections publiques a été organisée secrètement. Pourtant il y a encore peu, la restitution des têtes maories à la Nouvelle-Zélande avait fait l’objet d’un large débat puis d’un vote à l’Assemblée nationale. Rien de tel ici. Les enjeux diplomatico-commerciaux sont la raison de cette restitution, comme le fut en 2010, la restitution déguisée en prêts de cinq ans renouvelables, à la Corée du Sud de manuscrits royaux, appartenant (juridiquement) à la BnF. Le problème des restitutions est un sujet sensible et chaque pays marche sur des œufs craignant d’ouvrir la boîte de Pandore. Il n’empêche, ce débat doit être public afin de ne laisser aucune zone d’ombre. Par exemple, pourquoi Christian Deydier, un antiquaire spécialiste de la Chine n’a-t-il pas vérifié la provenance des objets donnés ? Dans quelles conditions les donations sont-elles révocables ? La raison d’État a peu sa place dans toute cette histoire.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°438 du 19 juin 2015, avec le titre suivant : Donations révocables

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