Danse - Ancienne danseuse de l’Opéra de Paris passée du côté du contemporain à la fin des années 1980, collaboratrice de Dominique Bagouet et de Boris Charmatz, Olivia Grandville élabore depuis une vingtaine d’années un dialogue entre danse et langage.
Ayant à cœur la transversalité, elle a travaillé notamment sur le lettrisme d’Isidore Isou, le cinéma de John Cassavetes ou encore la musique de John Cage. Créée en 2016, la pièce qu’elle présente en clôture des Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis, les 16 et 17 juin au Nouveau Théâtre de Montreuil, s’inspire d’un chef-d’œuvre de Pieter Brueghel l’Ancien, Combat de Carnaval et Carême (1559). Le fameux tableau du Kunsthistorisches Museum de Vienne oppose l’exubérance de Carnaval à l’austérité de Carême. Dans ce que la chorégraphe nomme un « double mouvement respiratoire », le rite de passage cyclique s’effectue dans une perpétuelle métamorphose des corps. Par sa vitalité, l’œuvre est un tableau, déjà, qui danse, tout en dissimulant une critique sociale. À partir de cela, Olivia Grandville a imaginé une « danse carnivore », se nourrissant de la peinture et répondant à un mode opératoire précis. Sur scène, les dix danseurs réagissent à des consignes de gestes données via un casque audio, inspirés de ceux, à l’expressivité baroque, des cent soixante personnages du tableau de Brueghel. Entre deux attitudes, le processus laisse la liberté aux danseurs d’inventer le mouvement.Ainsi se déploie, fouetté à intervalles réguliers par la musique de Vivaldi mêlée aux rythmes électroniques du DJ Robert Hood, un tableau vivant expressionniste où la caricature mêle le rire et l’effroi. Lue à haute voix par Olivia Grandville, l’ekphrasis du tableau, inspirée de l’analyse qu’en a faite l’ethnologue Claude Gaignebet, accompagne l’emphase des mouvements des danseurs s’agglutinant en grappes, tandis qu’en surplomb un zigzag de lumière, invention géniale du grand éclairagiste Yves Godin, fait flotter la menace divine. Une danse des fous qui se poursuit en enfarinade où les corps se laissent oublier en formes indistinctes et épuisées.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Olivia Grandville fait danser Brueghel
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°702 du 1 juin 2017, avec le titre suivant : Olivia Grandville fait danser Brueghel