Tout comme Paris fut capitale de l’Europe au siècle classique, supplantée par Londres à l’âge industriel, New York aura été la métropole du monde à la fin du deuxième millénaire. Longtemps, l’Amérique s’était étendue latéralement : Go west était le mot d’ordre auquel obéissaient les pionniers venus de la vieille Europe. Mais la verticalité de New York, contrainte par l’étroitesse des espaces constructibles, fixe en une parlante métonymie le grand dessein des temps modernes : une ascension vers le ciel, l’avènement d’une nouvelle dimension. De là sans doute cette vocation universelle de la plus peuplée des villes américaines, siège ô combien légitime de l’Organisation des Nations Unies. L’auguste maxime du dramaturge latin Térence, « Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger », y revêt tout son sens puisque, davantage que partout ailleurs, tout être vivant peut se sentir chez lui à New York. Rien de plus naturel, dès lors, que sa propension aux extrêmes en tous domaines. New York est nôtre, elle est ce que nous sommes tous. Et notamment en matière artistique. Quant aux musées de tout poil, New York a pour seules rivales Londres et Paris. D’autres trancheront la récurrente question de la suprématie du point de vue des lieux d’exposition et de négoce, de la créativité et de l’émulation. Nul doute en tout cas qu’à côté du quartier traditionnel des beaux-arts qu’est l’East Side (à l’Est de la 5e Avenue), entre le Museum of Modern Art et le Guggenheim, se soit ouvert un nouvel horizon saisissant pour l’amateur de création contemporaine, où la grande foule ne se précipite pas encore. Pour y accéder, il faut quitter Manhattan vers l’Est en franchissant l’East River par le pont de Williamsburg. On se trouve à Long Island City dans le « borough » de Queens où se dresse l’étonnant PS1 (Public School 1), une ancienne école transformée en musée de quatre étages où s’exposent des contemporains confirmés (Schnabel, LeWitt, Serra), aussi bien que l’avant-garde en peinture et en vidéo. Autre détour mémorable, le Socrates Park voisin, haut lieu de la sculpture en plein air, où les œuvres de toutes espèces sollicitent la participation amusée du visiteur. A Brooklyn, un peu plus au Sud, la galerie Pierogi symbolise bien l’esprit nouveau de ces petites rues parfaitement sûres où les colonies d’artistes arrivent de partout : on y expose en alternance les travaux d’un demi millier d’entre eux. Depuis quelques années, les nouveaux quartiers de l’art contemporain sont Chelsea et le Meat Market au sud de Manhattan, où ont fleuri des dizaines de galeries. Mais la vocation de New York ville d’art ne s’exprime pas seulement dans ces lieux réservés. Quoi de plus charmant, et de plus anachronique en cette capitale de l’innovation, que ces réservoirs à eau en bois qui couronnent tant d’immeubles ? De plus géométrique que ces escaliers de secours, volées diagonales de métal courant le long des murs ? De plus grandiose que ces ponts-cathédrales où la circulation automobile et ferroviaire trépide de jour comme de nuit ? A New York depuis toujours, l’art est aussi dans la rue.
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New York contemporain (part I)
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°526 du 1 mai 2001, avec le titre suivant : New York contemporain (part I)