« Si on marquait sur une carte tous les itinéraires par où je suis passé et si on les reliait par un trait, cela ferait peut-être un Minotaure », déclarait Picasso.
La Ville magique, le catalogue de l’exposition du même nom au LaM à Villeneuve-d’Ascq (LaM-Gallimard, 230 p., 35 euros, exposition qui s’est terminée le 13 janvier dernier), est une ville menaçante, angoissante, étouffante. Elle cristallise nos peurs et nos frustrations car, comme le formulait Nietzsche, « l’architecture est la métaphore des complexités du psychisme humain ». Le choix pointu des œuvres, associé aux réflexions et aux mises en lumière implacables des auteurs, nous emporte dans un vertige saisissant. Dans ces pages est reliée la vision des artistes qui négligent « les signes d’individualité humaine et la particularité des lieux, et évoque[nt] en quelque sorte la métropole comme une généralité abstraite ». L’homme est incessamment placé au cœur de cette vision cauchemardesque, puisqu’il est créateur et victime à la fois de ce monstre fardé. Mais le vertige qui nous guette est également physique puisque, « depuis la Renaissance, la perspective a légiféré sur notre façon de voir le monde ». Perspective que les artistes sélectionnés ici n’ont eu de cesse de dissoudre par, notamment, le montage qui devint une « stratégie esthétique clé pour représenter la ville comme un ensemble disparate d’individus et d’objets ». Si, pour Baudelaire, flâner est une immense jouissance, la lecture de cet ouvrage déstabilisant, percutant et intelligent comme rarement, nous renvoie à une vision biblique de la ville inhumaine vouée à la désespérance. Agoraphobes s’abstenir !
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Une ville angoissante, mais intelligente
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°656 du 1 avril 2013, avec le titre suivant : Une ville angoissante, mais intelligente