Sous la palette des mots

Quel que soit le parcours, il y a à ses racines un ensemble de formules à se raconter, des « mythes fondateurs » vécus par les sens en un temps donné, des extraits de sens profond glanés en chemin, et qui composent ensemble la latitude, les mystères et les frontières tangibles d’une manière d’être au monde. Nous y trouvons une posture qui détermine inconsciemment la globalité des attitudes, un livre de lois personnel auxquelles on se réfère comme habitude, un code source qui permet en quelques traits de donner une expression reconnaissable à chacune de nos respirations, à chacune de nos créations, à chacun de nos gestes. Et de nos gestes les plus intimes, les plus créateurs, ceux de l’expression artistique. À travers une composition dynamique qu’il aurait pu emprunter à Arthur Rimbaud, Richard Texier, artiste peintre, sculpteur, graveur et ici écrivain nous détaille le portrait sensible aux origines de sa palette de couleurs. Noir d’ivoire, Violet cardinal, Indigo, Vert cinabre, Ocre jaune, Rouge vermillon, Blanc d’argent, c’est avant tout l’évocation poétique, je veux dire par là créatrice, bouleversante, d’un éventail de souvenirs, de chocs sensitifs, d’émotions, de rencontres et de découvertes qui ont fondé, au fil de moments marquants sur son chemin de vie, l’essentiel de son vocabulaire pictural. En sept récits, chacun concentré sur une couleur et suivi d’une présentation de sept tableaux qui la mettent en vie, il donne à percevoir de ses créations une dimension supplémentaire. Celle de la profondeur d’âme. Celle du relief des moments de vie. Celle du temps du récit qui sous-tend la finalité de chaque pigment et se condense dans l’épaisseur de chaque coup de pinceau. Et comment l’usage de la couleur et des traits nous dévoile sous la fine peau de la toile, la forme charnelle du poète. L’être unique, toujours en chemin d’être soi, et qui par l’usage son art s’exprime ici.