En non-peintre accompli, Thieri Foulc se refuse à peindre. Ce n’est pas un refoulement, c’est tout le contraire.
C’est par les mots, parce qu’il faut bien en mettre pour atteindre la pensée, qu’il construit ses tableaux. Peintures imaginaires, en devenir perpétuel, comme en suspens, il en donne le principe, le désir et l’élan. Autant de propositions à s’approprier. Il entre guillemets : ce qu’on voit, le coup d’œil, la position par rapport au tableau, ce qu’il contient, sa composition, une recette ou encore différentes options à étudier. Aussi, la négation contenue dans cette peinture non peinte laisse le champ libre à tout ce que ne diraient pas son affirmation, son cadre et sa stature. Matériellement, il n’y a, à peu près, que des mots sur du papier. Pourtant, il y a peinture, acte de peindre. Et au fil de ce recueil musée, il donne aux tableaux par les mots à être plus qu’à exister. Il s’en détache un questionnement : qu’est-ce qui fait la chair d’un tableau, et qu’est-ce qu’il en reste lorsque le regard direct n’est plus en sa présence. Le souvenir, c’est-à-dire ce que nous avons pu ou su en percevoir des traits, des contrastes, des couleurs, et ce que nous savons en faire rejaillir en nous. Le ressenti, et quelles émotions, quelles sensations internes et quelles appréciations en avons-nous dessus. L’imagination, ou quelle conduite, quelle poursuite ce tableau maintient-il en nous, et quelle relation propre continue-t-il à entretenir avec notre esprit ? Une alternative s’offre à nous : la peinture est-elle un art des yeux ou de l’imaginaire ? L’artiste soutient avec Peintures non peintes la dernière thèse. Là où, aux mêmes éditions et dans son recueil Salons– dont nous avons déjà parlé dans ces colonnes –, Giorgio Manganelli écrit sur des tableaux, c’est-à-dire fait proprement œuvre littéraire, avec poésie et profondeur, au-dessus de tableaux existants, Thieri Foulc pratique ici une démarche inclusive en faisant, par l’esprit et par les mots, œuvre de tableau. Un peintre viendra-t-il en faire récit avec ses pinceaux ? Serait-ce alors un acte réducteur ou poétique ?
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Plus que peindre, ne pas le faire
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°732 du 1 mars 2020, avec le titre suivant : Plus que peindre, ne pas le faire