L’hôtel Drouot, ses acteurs et ses usages sont disséqués par un habitué des lieux
Temple des enchères depuis 1852, Drouot est un lieu atypique et fascinant où fourmillent trois à cinq mille visiteurs par jour. Patrick de Bayser, expert en dessins auprès des commissaires-priseurs, en connaît tous les arcanes, les codes et pratiques. Il en a fait un livre, d’un format très maniable (11,5 x 17,5 cm), rédigé sous la forme d’un abécédaire de A à Z (de près de 900 entrées), à parcourir très librement. Il ravira autant le novice des enchères avide de bons conseils, que l’enchérisseur aguerri qui sourira à la lecture de certains passages. Beaucoup d’accroches, d’anecdotes et de renvois rendent la lecture vivante et ludique.
L’auteur nous plonge immédiatement dans l’Atmosphère du lieu car « Drouot a une gueule d’atmosphère ». Il en décrit d’abord l’Accueil dans un hall « en pleine effervescence » où les gens se bousculent. À propos des escalators menant le public aux salles, il prévient : « J’engage le visiteur à ne pas se pencher par-dessus la rambarde lorsqu’il aperçoit une connaissance qu’il veut interpeller, car les plafonds forment alors de véritables guillotines. […] Lorsque la foule est trop dense, il est bien plus pratique d’utiliser l’escalier situé au fond du hall. Sauf à midi, où il sert d’agora aux commissionnaires. »
Tiens justement, passons à Commissionnaire, autrement appelé Collet rouge ou Savoyard, dont la description, comprenant l’historique et l’organisation détaillée, tient sur quatre pages, à égalité avec Commissaire-priseur, c’est dire son importance. Commissionnaire renvoie à moult mots tels Fromage parce que, dans les sous-sols de Drouot, les Savoyards affinaient les fromages, ainsi qu’à Enlèvement où l’on apprend que « chez vous, Nounours et Coco Bel Œil, commissionnaires, enlèveront vos meubles pour le compte d’un commissaire-priseur » ou encore à Magasinage, Mise en salle, Patron, Ripeur, Transporteur, Yoyo, Zanzi et Tombé qui fait référence à « la brebis galeuse » qui fait « tomber du camion quelque marchandise oubliée lors d’un inventaire » !
Comme au théâtre
« La première enchère que vous portez est comme un dépucelage. Vous mourez d’envie de le faire, mais vous ne savez comment vous y prendre […] », démarre Patrick de Bayser pour Enchère. Saviez-vous encore que, dans la bouche d’un brocanteur, Cimetière est synonyme de musée ; que les personnels d’entretien de Drouot sont surnommés les Tapissiers comme au théâtre, ou encore qu’« À l’angle des rues Drouot et Rossini […], d’octobre à avril, qu’il pleuve, qu’il gèle ou qu’il vente, Mme Michelin – ainsi surnommée car, pour supporter les conditions climatiques, Fanny enfile jusqu’à huit épaisseurs, ce qui la fait ressembler à notre Bibendum national – prépare amoureusement des crêpes » ? On remarquera, en outre, le professionnalisme de l’expert en dessin portant un éclairage approfondi sur son médium de prédilection : Aquarelle, Compte-fils, Contre-épreuve, Crayon, Dendrite, Estompe, Fusain, Graphite, Grattage, Lavis, Mine de plomb, Monotype, Pastel, Pierre noire, Rehauts, Sanguine, Trois crayons…
PATRICK DE BAYSER, LE PIÉTON DE DROUOT, LES ENCHÈRES DE A À Z, éditions Le Passage, 2009, 448 p., 18 euros, ISBN 978-2-8474-2144-6
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Patrick de Bayser, Le Piéton de Drouot, les enchères de A à Z
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°319 du 19 février 2010, avec le titre suivant : Patrick de Bayser, <em>Le Piéton de Drouot, les enchères de A à Z</em>