Par cinq siècles de fond

La découverte est de taille puisqu’elle compte 13 000 numéros d’inventaire – essentiellement des céramiques, mais aussi des perles et des lingots de verre, des enroulements de cuivre et des bracelets en métal – et concerne un domaine jusqu’ici peu connu, celui de la vaisselle à usage quotidien fabriquée en Chine, en Thaïlande et au Viêt-nam, puis vendue dans le Sud-Est asiatique. Le récit de cette expédition, rondement menée en deux mois, est fait sur le ton de l’enquête policière, musique et situations extrêmes à l’appui : une tempête, des fonds vaseux où la visibilité est nulle, des poissons-pierres mortels pour les plongeurs, un entrepôt gardé par des militaires armés jusqu’aux dents, les pannes des engins perfectionnés, 50° au soleil... Cependant, le stratagème s’accorde parfaitement aux objectifs de la mission. Il s’agit, à partir des indices fournis par les sismographes, de repérer la cargaison, de la récupérer, de la mettre à l’abri et de l’étudier pour l’identifier. Les images, superbes, révèlent l’extraordinaire qualité des pièces, et la lumière bleutée des profondeurs donne une aura de mystère à ces objets que les scientifiques pourront désormais étudier à satiété. Le message se veut optimiste : grâce à ces assiettes, jarres et autres récipients, Brunei retrouve un patrimoine perdu, notion étrangère dans un pays où toute trace d’artisanat a disparu au profit d’une industrie pétrolifère envahissante. Ironie du sort, c’est Elf Aquitaine qui a financé l’opération pour faire passer un oléoduc, mais un pan important de l’histoire de la région aurait disparu si l’épave était tombée aux mains des nombreux pirates de la mer de Chine...