Revue

L’économie de la culture à la loupe

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 25 novembre 2014 - 551 mots

Les « Cahiers français » dressent un état des lieux du rôle de l’État dans la culture et des bouleversements en cours dans ses divers domaines.

Le numéro d’août 2014 des Cahiers français, édités par La Documentation française livre un ensemble passionnant d’articles sur les mutations en cours dans l’économie de la culture, principalement en France, sous l’effet de la mondialisation et du numérique. Ainsi le rapport du département des études du ministère de la Culture sur le poids important de la culture dans le PIB, connu des lecteurs du Journal des arts, comme beaucoup d’autres sujets dans ce numéro, met en évidence la baisse relative de celle-ci depuis 2003, revenant au niveau de 1996. Même le marché de l’art est stable depuis 1990, mais l’auteur sans doute peu en confiance avec les rares chiffres dont il dispose ne s’étend pas sur le sujet. Cette baisse du PIB culturel est imputable au net recul du disque, de la vidéo et de la presse dont la raison est à chercher pour les deux premiers dans le piratage numérique. Plus loin, on apprend que le chiffre d’affaires de la musique enregistrée a chuté de 46 % entre 2002 et 2013. En revanche, celui du spectacle musical a augmenté de 70 %. Tout se passe comme si les internautes profitaient des économies réalisées sur la consommation de musique ou de films piratés ou moins chers pour aller aux concerts ou au cinéma, dont les entrées ont augmenté de 87 % entre 1992 et 2011. La croissance des visiteurs dans les musées montre bien également l’appétence du public pour des lieux physiques et collectifs.

Mais alors que les tensions économiques traversent tous les secteurs, jamais l’offre n’a été aussi élevée : 654 films sont sortis en France en 2013, 66 527 livres ont été édités, 4 400 titres de presse papier sont publiés. Même le théâtre public, (pour lequel on aurait bien aimé que l’auteur fournisse des chiffres de fréquentation) souffre d’une surproduction. Le numérique a considérablement abaissé les coûts de production augmentant corrélativement l’offre. Reste que toutes les propositions de cette offre ne se valent pas – un terrain sur lequel se gardent bien d’aller les auteurs– et que l’attention du public se focalise toujours autant sur un nombre limité de productions.

Le débat en vient naturellement au rôle de l’État vers lequel on se tourne trop souvent en France quand on ne veut pas se demander pourquoi on a pas assez de clients. Malgré le discours teinté d’idéologie obsolète de certains sur le supposé désengagement de l’État et la mercantilisation de la culture, on est frappé par le poids du secteur public. Au plan législatif, les pouvoirs publics n’ont eu de cesse au XXe siècle de protéger et valoriser le patrimoine historique. Au plan budgétaire, la dépense publique dans la culture est passée de 1 % en 1995 à 1,5 % du PIB en 2005. À partir de 1981, les collectivités locales ont ajouté leurs propres moyens à ceux de l’État (sans s’y substituer) dans la construction et l’animation de sites culturels. Au plan fiscal enfin, le plaidoyer pour la loi mécénat rappelle en creux que ce dispositif s’ajoute aux aides d’un État bien présent. Un seul regret dans cette excellente parution, l’absence d’analyse spécifique sur la presse, la radio et la télévision.

Cahiers français, numéro 382

Économie et politiques de la culture, La documentation française, à commander sur le site de l’éditeur.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°424 du 28 novembre 2014, avec le titre suivant : L’économie de la culture à la loupe

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