Le catalogue Nemours, un parcours semé d’obstacles

Ce somptueux ouvrage de 4,8 kg, réalisé sous la direction de Serge Lemoine, est constitué de deux volumes reliés et cartonnés, respectivement de 328 pages et 748 pages, contenus dans un coffret. Sa gestation fut longue, parfois difficile.

Aurélie Nemours avait désiré et organisé de son vivant la réalisation d’un catalogue raisonné. En 1999, l’artiste fonde l’Association culturelle Nemours (association loi de 1901) dans le but de promouvoir la diffusion de son œuvre (peinture et écrits) ainsi que d’organiser un prix annuel attribué à un artiste de toutes disciplines. Puis, afin de permettre à son association de mener à bien ses missions et de garantir sa pérennité, l’artiste inaugure en 2001 la Fondation Aurélie Nemours – Institut de France, créée sous l’égide du chancelier de l’Institut Pierre Messmer, fondation à laquelle elle lègue tout son patrimoine, y compris les œuvres qui seront dans son atelier à sa mort.

Les premières recherches sur Aurélie Nemours (1910-2005), peintre encore peu connue au début des années 1980, s’amorcent à l’université. Enseignant à la faculté de Grenoble, Serge Lemoine fait découvrir à ses étudiants cette peintre rattachée au courant de la peinture abstraite géométrique. L’un de ceux-ci, Christian Olivereau, soutient un mémoire de maîtrise en 1984 et propose un premier catalogue raisonné. En 1998, à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Évelyne de Montaudoüin réalise, sous la direction de Patrick de Haas, des recherches sur la réception critique des explorations d’Aurélie Nemours. Deux ans plus tard, l’étudiante entreprend une thèse de doctorat, toujours à la Sorbonne, cette fois sous la direction de Serge Lemoine, avec en ligne de mire la rédaction d’un catalogue raisonné actualisé de l’œuvre peint de l’artiste. Elle soutient sa thèse le 20 janvier 2010. Son catalogue comporte alors quelque 1 250 numéros.

Prise en charge par l’Association culturelle Nemours, une publication est alors décidée. Ce ne sera pas un long fleuve tranquille. « Qui eût pu envisager un seul instant que le chancelier de l’Institut de France qui succéda à Pierre Messmer aurait voulu par toutes sortes de manœuvres empêcher, avec ses services, la parution de cet ouvrage qu’il avait le devoir de faire aboutir ? », réagit Serge Lemoine qui évoque les multiples difficultés rencontrées lors de la chancellerie exercée par Gabriel de Broglie de 2006 à 2017.

Heureusement, avec Xavier Darcos, élu chancelier de l’Institut de France le 1er janvier 2018, tout s’est à nouveau passé au mieux, permettant enfin la parution de cet exigeant ouvrage qui répertorie à ce jour 1 364 œuvres. Toutes sont précisément documentées (titre, date, matériaux, format, expositions éventuelles, bibliographie, localisation actuelle). Seules les œuvres sur papier, excepté les pastels Les Demeures, les Collages et les Vinyles, n’y figurent pas. Une édition papier a été choisie, mais « afin de bénéficier des possibilités offertes par les nouvelles technologies, un CD-ROM était envisagé pour publier le catalogue et sa documentation en accompagnement d’un livre classique. En raison de l’obsolescence prévisible de ce support, le projet fut abandonné au profit de la création d’un site Internet. Devant le coût de l’entreprise et les incertitudes soulevées par sa gestion dans le futur, il est apparu préférable d’en rester au livre classique », précise Serge Lemoine. L’auteur, président de l’Association culturelle Nemours, ne manque pas de remercier chaleureusement les nombreux contributeurs, en particulier Évelyne de Montaudoüin, Marie Sophie Lemoine et Ode Bertrand, « élève » et assistante d’Aurélie Nemours, dont on découvre un passionnant entretien.