Cécile McLorin Salvant (née en 1989) est une artiste unique. Nous sommes tous uniques, mais elle l’est plus que les autres… À peine trentenaire et déjà couronnée trois fois par l’Académie des Grammy Awards, cette jeune musicienne franco-américaine peut faire ce qu’elle veut de sa voix.
Et plus que les autres, n’insistez pas. Avec une amplitude à la Sarah Vaughan, une précision rare et une exigence folle, la chanteuse ne cesse d’innover, d’inventer, d’expérimenter, de se renouveler pour aller toujours plus loin. Dans Ghost Song, son nouvel album, elle joue avec son timbre, avec les mots. Elle joue avec les techniques, les échos, les codes, et elle se joue des frontières. La formidable Cécile nous balade, où elle veut. Et où elle va, on la suit. Ghost Song, c’est aussi le titre d’une exposition new-yorkaise où l’on peut découvrir ses dessins et ses broderies gigantesques. Car lorsqu’elle ne chante pas, la divine dessine, crée, fait taire sa voix pour en faire entendre une autre : sa voix intérieure. C’est peut-être finalement la même. Dans ses œuvres, elle introduit du bizarre, elle déforme, elle démesure, elle envoûte et elle dérange un peu, aussi. Elle bouge le cadre de l’art visuel comme celui du jazz. Elle cite la poétesse africaine-américaine Audre Lorde et la pionnière de l’art américain Georgia O’Keeffe, avec cette phrase qu’elle a brodée sur une grande toile blanche. Ici, le long d’une vaste silhouette qui occupe la largeur du drap, elle a écrit « My Urge Was Greater Than My Sadness » : mon envie était plus grande que ma tristesse. Là, c’est une chanson issue du folklore noir du milieu du XIXe siècle qu’elle a choisi d’interpréter. En blanc sur blanc, elle a brodé les paroles de « Run, Nigger, Run », qui évoque la fuite d’un esclave dans le Sud des États-Unis. Cette œuvre-là sera vendue au profit d’un organisme aidant les femmes incarcérées. Car Cécile McLorin Salvant ne s’engage pas seulement « body and soul » dans son travail.
Il y a de la musique dans ses œuvres, il y a du mouvement, de l’énergie, des volcans, des femmes, de l’amour, et un formidable appétit de vie. Depuis quelque temps déjà, la musicienne-brodeuse-dessinatrice travaille à un conte musical animé, intitulé Ogresse. Elle en a imaginé l’histoire, celle d’une créature qui vit dans les bois et terrorise le monde, jusqu’au jour où elle rencontre l’amour… Cette histoire, elle la chante, elle la dessine, elle l’incarne dans ce film qui sera un long-métrage et dont elle a déjà montré une ébauche au festival de Tribeca, à New York. À l’écran, il y a une femme, un volcan, et de l’amour.
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L’autre voix de Cécile McLorin Salvant
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°753 du 1 avril 2022, avec le titre suivant : L’autre voix de Cécile McLorin Salvant