L‘Art français – Le XXe siècle

Comment définir, s’il le faut, l’art français de 1900 à nos jours ? Quelle histoire en retracer ? C’est à cet exercice périlleux que s’est confronté Philippe Dagen, en historien soucieux d’offrir leur conclusion chronologique aux quatre volumes classiques consacrés au sujet par André Chastel. Mais, le terrain est certainement miné. En 1945, par exemple, dans un ouvrage dirigé par Gaston Diehl, on pouvait lire le texte suivant, sorti d’une étude pompeuse sur « l’universalité de la peinture française » : « Un peintre conserve sa qualité de “peintre de l’école de Paris“ tant qu’il demeure représentatif de ses qualités raciales toujours présentes dans ses œuvres, épurées et polies par un séjour parisien. » À ce féminin pluriel radical (épurant la race avec l’œuvre) étaient associés les noms de Picasso, Van Dongen, Foujita, Gris, Miró (épuré de son accent)... 
Ce principe d’intégration ne relevant que d’un profond racisme auquel l’art sert de fondement, pourrait commodément se confiner à certaines périodes de l’histoire. Le XXe siècle, en effet, est riche de conflits propices à générer ces perles nationalistes exaltant un peu partout une peinture « bien de chez nous ». Pourtant, des expositions récentes consacrées à « l’art français » – dans l’autonomie relative de ses guillemets – n’étaient peut-être pas sans rappeler ce discours, en s’en défendant naturellement. Aussi, l’ouvrage de Philippe Dagen vaut-il autant pour la synthèse historique de l’art français de ce siècle qu’il ne manque pas de fournir, que pour son introduction, interrogeant avec précaution la légitimité et les modalités de son existence.