DVD

L’amour fou

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 14 avril 2006 - 527 mots

Un coffret réunissant deux films de Fabrice Maze retrace la vie et l’œuvre de Jacqueline Lamba, muse de Breton.

Après avoir publié en 2003 un DVD réalisé sur son père André Breton, à l’occasion de la vente de l’atelier du théoricien du surréalisme, Aube Elléouët-Breton – avec les éditions Seven Doc – propose aujourd’hui un DVD réunissant deux films sur la vie et l’œuvre de sa mère, Jacqueline Lamba.
Née en 1910 à Saint-Mandé (près de Paris) de Jane Pinon et de José Lamba, ingénieur agronome, Jacqueline Lamba perd très tôt son père, puis sa mère, en 1927. Élève de l’école de l’Union centrale des arts décoratifs, elle se lie d’amitié avec Marianne Clouzot, fille du conservateur du Musée Galliera (Paris), et Dora Maar. Bouleversée par la lecture des Pas perdus, de Nadja et des Vases communicants, elle cherche à rencontrer ce poète nommé André Breton. Ce sera chose faite le 29 mai 1934. Moins de trois mois plus tard, elle l’épouse à la mairie du 9e arrondissement, avec pour témoins Paul Éluard et Alberto Giacometti. De leur union naît Aube, le 20 décembre 1935.
Grâce à des documents d’époque, les deux films – L’Amour fou d’André Breton et La Peinture jusqu’au bout du ciel – retracent la vie de Jacqueline aux côtés de Breton, le voyage au Mexique où ils rencontrent Diego Rivera, Frida Kahlo et Léon Trotsky, jusqu’à la guerre et l’exil aux États-Unis. Là, la jeune femme quitte Breton en 1942 pour le photographe David Hare. Après la naissance de leur fils Merlin, ils se sépareront une première fois en 1951, année du retour de Jacqueline en France, avant de rompre définitivement en 1955.

Lettres du poète
Les films insistent sur la lente maturation artistique de Jacqueline Lamba. Dans le sillage de Breton d’abord, elle participe aux expositions surréalistes, notamment à la galerie Charles Ratton, à Paris, ou à Art of This Century, la galerie de Peggy Guggenheim à New York. Malgré plusieurs expositions personnelles en galerie à Paris dans les années 1950, des envois pour des salons comme le Salon de mai, le Salon d’automne ou le Salon des indépendants, l’artiste cherche son style, se tournant tantôt vers Picasso, tantôt vers Matisse ou les Fauves. En 1962, elle décide de se consacrer définitivement au paysage, dans une facture toute personnelle d’un pointillisme qui allie abstraction et sensation. En 1967, grâce au soutien de Pablo Picasso, elle présente cinquante œuvres au Musée Picasso d’Antibes. Yves Bonnefoy signe la préface du catalogue. Elle s’éteint en 1993, cinq ans avant sa première exposition posthume organisée par la Galerie 1900-2000 à Paris.
Réalisés par Fabrice Maze, les films font intervenir de nombreux témoignages souvent anecdotiques, heureusement enrichis des lettres de l’artiste, d’un style affirmé et qui rendent mieux compte de la forte personnalité de Jacqueline. Une femme que le destin conduisit à participer à quelques-unes des expériences les plus passionnantes du XXe siècle avant qu’elle ne se consacre, solitaire, à un art en dehors du temps.

JACQUELINE LAMBA, PEINTRE, coffret DVD comprenant 2 films : L’Amour fou d’André Breton (58 min) ; La Peinture jusqu’au bout du ciel (55 min), Seven Doc, 2006, réal. Fabrice Maze, 23 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°235 du 14 avril 2006, avec le titre suivant : L’amour fou

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