Rome

La logique du paysage

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 18 février 2005 - 521 mots

Les éditions Actes Sud publient un ouvrage de référence sur ce genre qui acquit
ses lettres de noblesse à la fin du XVIIIe siècle.

Le Colisée, les monuments du Palatin, le Temple d’Apollon et autres vestiges antiques de sa grandeur passée, les forums, thermes, aqueducs, jardins, fontaines... : dans les années 1780, des peintres français dans le sillage de David décident de donner une nouvelle image de la Ville Éternelle. Finie la cité obscure et romanesque rêvée par Piranèse, place à la Rome réelle, disciplinée par l’ordre et la logique. « Notre livre retrace l’histoire de cet itinéraire, qui n’apparaissait pas jusqu’à présent dans les études de l’époque néoclassique. Une histoire du paysage – au début ce sont des vues de villes désertes et géométriques – marquée par une forte empreinte rationaliste », explique l’auteur des Paysages de la Raison, Anna Ottani Cavina. Professeur d’histoire de l’art moderne à l’université de Bologne et à la Johns Hopkins University (Bologna Center), celle-ci a assuré le commissariat général de l’exposition « Paysages d’Italie. Les peintres du plein air (1730-1830) » organisée en 2001 au Grand Palais, à Paris (lire le JdA n° 125, 13 avril 2001). La manifestation était l’aboutissement d’un long travail commencé avec un ouvrage paru en italien en 1994 et aujourd’hui traduit en français. Anna Ottani Cavina revient sur ce moment clef où la beauté élémentaire et dépouillée des temples grecs archaïques oriente les artistes vers « une quête de formes essentielles, une accentuation de l’aspect conceptuel de l’image ». Dessinant toujours sur le motif, ceux-ci s’emploient à révéler les formes géométriques des édifices doriques pour faire éclore des « paysages d’idées ».
En témoignent les travaux de Gauffier, Drouais ou Valenciennes, auxquels il convient d’associer des peintres venus d’Angleterre, du Danemark, de Hollande. Les Italiens, eux, n’adhèrent pas aux propositions radicales de leurs confrères.
Dans une première partie, Anna Ottani Cavina analyse la genèse et le développement de ce paysage « rationaliste », de Poussin à David en passant par Flaxman, Asmus Jakob Carstens et Humbert de Superville. Elle retrace ensuite l’évolution de cette tendance géométrique, de son origine avec les paysages réalisés par Thomas Jones et Valenciennes, jusqu’à la génération précédant Corot.

Théorie du paysage
Très théorique, le texte est enrichi de délicates illustrations, tels Les Cyprès de la villa d’Este à Tivoli par Fragonard, Vue de Rome avec le Panthéon et la colonne Antonine de Drouais, Maison à Naples (1782) par Thomas Jones ou encore À la villa Farnèse : les deux peupliers de Valenciennes. Les reproductions agrémentent la lecture de l’ouvrage qui, avec À la découverte du paysage vernaculaire paru en 2001 et, plus récemment, Esthétique du paysage, contribue à la constitution d’un ensemble de référence sur la théorie du paysage, lieu de contemplation mais aussi objet de conceptualisation esthétique.

Anna Ottani Cavina, Les paysages de la raison, éditions Actes Sud/ENSP (École nationale supérieure du paysage), Arles/Versailles, 2005, 254 p., 28 euros, ISBN 2-7427-4280-8. À lire aussi : Raffaele Milani, Esthétique du paysage, Actes Sud, 2005 238 p., 25 euros ; John Brinckerhoff Jackson, À la découverte du paysage vernaculaire, Actes Sud/ENSP, 2003, 278 p., 24 euros.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°209 du 18 février 2005, avec le titre suivant : La logique du paysage

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