Hormis les précieux Mémoires de l’artiste, publiés en 1933, et la maîtrise que lui a consacrée Madame Monod de Coninck (1967, Lyon II), il n’existait aucun travail sur Philippe-Auguste Hennequin. La monographie de Jérémie Benoit vient donc combler une sérieuse lacune.
Cet ouvrage constitue le vingt-quatrième volume publié par Arthena qui, depuis vingt ans, s’efforce d’offrir à l’histoire de l’art des ouvrages de référence sur des phénomènes artistiques, et surtout des monographies.
Jérémie Benoit, en quelques textes pertinents, situe cette personnalité complexe et définit son art qui ne l’est pas moins. L’auteur a choisi de cataloguer séparément peintures, dessins, gravures et lithographies, dont la plupart sont reproduits, et les œuvres majeures sont étudiées dans les chapitres introductifs. Un travail solide et documenté, et une contribution d’importance à l’histoire de la peinture révolutionnaire.
Lyonnais de naissance, Hennequin est mort en Belgique après y avoir vécu vingt-quatre ans. Il avait aussi été, en 1780, l’un des tous premiers élèves de David et connu son heure de gloire dans le Paris de 1800. De là date son chef-d’œuvre, Les Remords d’Oreste, qu’on a pu voir en cours de restauration en 1989 au Grand Palais ("La Révolution française et l’Europe"), puis à Lyon ("Les Muses de Messidor") et qui devrait bientôt trouver au Louvre un mur à sa taille (3,80 x 5,18 m !).
Exclusions et enfermements jalonnent sa vie. Enfant sans éducation, il vole pour satisfaire une vocation de peintre contrariée et connaît la maison de correction. Récidive chez David en 1780 : dénoncé par Wicar, il est chassé de l’atelier. À Rome dès 1784 (il fréquente Gagneraux, Chinard, Lethière et ... Cagliostro), il doit en fuir, en 1790, pour sympathies maçonniques. Sa ville natale le voit, jacobin, glorifier la répression sanglante de Fouché dans La Rébellion lyonnaise terrassée par le Génie de la Liberté (1794), qui a évidemment disparu avant la fin du siècle... Et c’est comme jacobin qu’il est emprisonné à Paris en 1796.
Ce peintre de la Révolution, fidèle à son engagement, a besoin pour s’exprimer de formats colossaux : ce qui suffit à fragiliser l’œuvre, condamné à la relégation, voire au dépeçage, quand est bannie l’idéologie qu’il incarne. Hennequin fut-il pour autant un grand artiste ? La raideur des gestes, les attitudes de convention où se déclinent quelques poncifs davidiens (le schéma du Marius de Drouais revient partout), l’aspect mécanique du dessin bouclé ne doivent pas surprendre : ce maniérisme néo-classique est alors un langage universel, qu’il faut admettre comme la stylisation des vases grecs qui lui sert de référence. La violence austère des compositions et de la facture est à l’image de l’homme et de ses idées.
Jérémie Benoit, Philippe-Auguste Hennequin, 1762-1833, Arthena (8, rue François Miron, 75004 Paris), 286 p., ill., 530 F.
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Hennequin, peintre et révolutionnaire
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°8 du 1 novembre 1994, avec le titre suivant : Hennequin, peintre et révolutionnaire