Ceci est une histoire vraie. Au Pays-Bas, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le capitaine Joseph Piller se voit confier la tâche de récupérer les œuvres d’art volées aux familles juives. Son enquête le conduit sur la piste d’un Vermeer, vendu à Goering par un certain Han Van Meegeren.
Han Van Meegeren, cet artiste raté, a participé à toutes les fêtes du Reich et tiré une petite fortune de son trafic de toiles. Tout contribue à baliser son chemin vers le peloton d’exécution. Cependant, au cours de sa captivité, il parvient à convaincre Piller de son innocence. Dans l’ombre du peintre sans talent se cacherait, en réalité, un faussaire de génie : Han Van Meegeren serait en effet l’auteur des Vermeer qu’il vendait. C’est du moins ce qu’il va plaider lors de son procès. Pour cela, il devra prouver au jury que lui, peintre unanimement considéré comme médiocre, est l’auteur de toiles authentifiées comme des chefs-d’œuvre de l’histoire de l’art. « Je voulais juste donner au monde plus de beauté, s’exclame-t-il, plus de Vermeer ! » À travers ses faux magnifiques, Han Van Meegeren triturait aussi une question qui taraude chacun d’entre nous : quel est le prix réel de notre travail ?
Le cinéma, lui, ne connaît pas de faussaires. Au mieux se contente-t-il de pasticheurs. Brian de Palma, par exemple, a multiplié les scènes à la manière d’Alfred Hitchcock. Mais un vrai de Palma se reconnaît et ne saurait passer pour un faux Hitchcock. Quant aux nombreux remakes, même proches de l’original, ils ne bernent personne et sont signés du nom de leur metteur en scène. Le mot « copie » appartient même au vocabulaire officiel du Septième Art. Car à la différence de la copie d’un tableau, celle d’un film reste « le film ». Les pellicules tournées et montées par la main des maîtres ne font l’objet d’aucun fétichisme. Jamais elles n’atteindront l’aura des peintures ni celle des manuscrits des grands écrivains. Il est néanmoins remarquable que Han Van Meegeren ait connu l’apogée de sa carrière alors que le cinéma prenait une importance grandissante dans les loisirs et la vie culturelle. Ses techniques sophistiquées sont contemporaines du célèbre article de Walter Benjamin, « L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique ». Par sa mise en scène trop scolaire, le film que Dan Friedkin tire de cette affaire fascinante n’a, quant à lui, rien d’original. Il possède pourtant un certain cachet : la valeur des histoires vraies.
À 55 ans, Dan Friedkin tourne avec Le Dernier Vermeer, son premier long-métrage. Homme d’affaires issu du monde de l’automobile, il est venu au cinéma par passion. Il a notamment coproduit Tout l’argent du monde de Ridley Scott, La Mule de Clint Eastwood, et The Square de Ruben Östlund, Palme d’or 2017, qui abordait déjà le monde de l’art. Claes Bang, qui y jouait le rôle d’un conservateur de musée, interprète Joseph Piller dans Le Dernier Vermeer.
Le film est disponible sur OCS.
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Fascination du faux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°744 du 1 juin 2021, avec le titre suivant : Fascination du faux