De la question du genre à celle des ovnis, la marge et le décalé revendiquent leur différence dans l’édition photographique.
J’ai toujours été intéressé par les discours de la marge, ceux qui s’écrivent sur les bords de l’Histoire, loin de tout pouvoir moral, politique ou social, loin de toutes normes du regard. C’est pour cette raison que je collectionne depuis de nombreuses années les photographies amateur : elles inventent une autre perspective sur la société », écrit le cinéaste Sébastien Lifshitz en préface de Mauvais Genre, corpus de deux cents images de sa collection de photographies couvrant un siècle de travestissement. C’est à partir de son film Wild Side (1984), que le réalisateur a commencé à collecter ces images de femmes et d’hommes qui osaient passer d’un genre à l’autre. Il y a de la joie, de la complicité, de l’audace, de la rébellion dans les regards et les attitudes devant ce qui fut longtemps prohibé par la société et la justice, et qui le reste encore dans bien des pays. Les textes de Christine Bard et d’Isabelle Bonnet apportent à ce propos un éclairage fort instructif sur cette question du genre au travers des révolutions épistémologiques contemporaines, mais aussi des pratiques photographiques.
Lambert et les ovnis
On le sait : le sujet et sa représentation ne font pas qu’un. La question de l’identité traverse l’histoire de l’art. Stéphanie Solinas en fait le cœur de son œuvre. La chaîne des représentations imaginée par l’artiste autour des cent quatre-vingt-onze Dominique Lambert répertoriés dans les Pages blanches de l’Annuaire téléphonique explore ce qui se joue dans les écarts entre un individu et son identité. À la faveur de l’exposition « Dominique Lambert » au Carré d’art de Nîmes [jusqu’au 16 octobre 2016], son étude, publiée d’abord sous la forme d’un livre d’artiste édité chez RVB Books en 2010 en vingt et un volumes sous coffret, a fait l’objet d’une nouvelle édition en un seul volume chez l’éditeur. Le récit est jubilatoire, notamment entre les vrais et les faux Dominique Lambert qu’elle combine dans une construction au cordeau non dénuée d’espièglerie.
L’enquête menée par Sara Galbiati, Tobias Selnaes Markussen, Peter Helles Eriksen sur le phénomène des ovnis dans les États du Nevada, du Nouveau-Mexique et de l’Arizona engage dans un récit de voyage tout aussi réjouissant. Construite à partir de témoignages recueillis, elle mêle une démarche artistique et une démarche anthropologique confondantes de justesse dans leur traitement.
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Étrange comme c’est étrange
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Abonnez-vous dès 1 €Sébastien Lifshitz, Mauvais Genre, Les travestis à travers un siècle de photo amateur les éditions Textuel, 248 p., 45 €.
Sara Galbiati, Tobias Selnaes Markussen, Peter Helles Eriksen, Phenomena, André Frère Editions, 176 p., 42,50 €.
Dominique Lambert, Stéphanie Solinas, éditions RVB Books, 306 p., 34 €.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°694 du 1 octobre 2016, avec le titre suivant : Étrange comme c’est étrange