En Occident, une peinture a toujours été conçue et perçue comme une image qui re-présente. Elle porte à l’existence une chose qui atteste de sa présence. C’est pourquoi toute peinture n’est que le résultat d’une conception du monde particulière. Elle dénote d’un système de pensée dans lequel s’inscrit la logique d’une époque. De ce fait, l’art du portrait, plus que tout autre genre, révèle la relation complexe qui existe entre l’homme et son environnement. Mais quand, au juste, l’individu s’est-il introduit dans la peinture ? À quel moment particulier le portrait devient-t-il soudain un genre autonome ? C’est à ces questions que répond Tzvetan Todorov dans son dernier ouvrage. Pour cet historien et philosophe, l’histoire du portrait en Occident débute véritablement au XVe siècle avec la peinture flamande. C’est à cet instant particulier que, pour la première fois, les représentations d’humains ne sont plus réductibles à des schémas sociaux, idéologiques ou à des codes funéraires. Sous l’effet de réformes religieuses, Jésus mais aussi les saints perdent une partie de leur divinité pour se rapprocher des mortels. Ils commencent à ressembler aux hommes ordinaires. Le monde se fait plus laïc et la peinture participe alors de ce renversement annonciateur de la Renaissance. L’être humain se déploie soudain dans la représentation de son individualité et son statut d’être autonome. Robert Campin, puis Jan Van Eyck et Rogier Van der Weyden ouvrent ainsi une nouvelle période de l’art visuel en Europe occidentale, qui ne prendra fin qu’avec Cézanne. La démonstration éblouissante d’intelligence de Todorov est à cet égard d’une logique sans faille.
Tzvetan Todorov, Éloge de l’individu, essai sur la peinture flamande de la Renaissance, éd. Adam Biro, 240 p., 100 ill., 390 F, ISBN 2-87660-289-X.
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Éloge de l’individu
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°522 du 1 décembre 2000, avec le titre suivant : Éloge de l’individu