Des œuvres toujours exigeantes et un niveau de ventes correct avec une plus grande disparité entre marchands que l’an passé ont marqué cette 28e édition.
MAASTRICHT - Tefaf reste la foire la plus prestigieuse au monde, d’une organisation impeccable. Elle a fermé ses portes le 22 mars dans un contexte globalement favorable. Il faut dire que c’est une machine bien rodée. « Je viens depuis quinze ans et ce qui est frappant, c’est de voir à quel point cette foire a la capacité de traverser le temps », note Franck Prazan (galerie Applicat-Prazan), qui a vendu dès l’ouverture Agrigente, de Nicolas de Staël. En effet, la foire tente de s’adapter au mieux à la demande. Cette année, elle a renforcé l’offre en art contemporain avec Night Fishing, un espace dédié à la sculpture contemporaine, qui a rencontré un beau succès. Parmi les huit galeries conviées, chacune présentant un seul artiste, la galerie Thaddeus Ropac a vendu Torso Rosa, de Georg Baselitz (1,4 million d’euros).
Tefaf est le plus étonnant des musées éphémères, tant le choix est grand et les œuvres souvent de qualité muséale. Cependant, à un tel niveau, on peut toujours chipoter : une section moderne de bonne tenue, mais avec quelques faiblesses, des manques en matière de mobilier de prestige ou une section de tableaux anciens moins fournie… Mais à ceux qui penseraient qu’il y a moins de chefs-d’œuvre que par le passé, Éric Coatalem rétorque : « Existe-t-il beaucoup de foires qui réunissent autant de grands noms comme van Dyck, Ribera, Fragonard… ? ». Assurément non. Autre petit bémol : plusieurs collectionneurs se sont plaints de la foule trop importante (10 000 personnes), lors du vernissage. Les organisateurs vont sans doute revoir les invitations et peut-être scinder le jour d’ouverture.
Des transactions sans folie
Si les 270 stands ne recelaient pas chacun un chef-d’œuvre, les pièces de haute qualité n’ont pas fait défaut et les exposants ont, pour la plupart – excepté quelques-uns en peinture ancienne pas très satisfaits – vendu correctement, sans exulter, grâce notamment à la venue en masse des Américains stimulés par la chute de l’euro face au dollar début mars. Éric Coatalem, a cédé dès le vernissage Le Lion, de Fragonard ainsi qu’une nature morte représentant un tapis d’Orient, de Pierre Dupuis, faux pendant d’un autre tableau de même sujet présenté sur le stand d’Alexis et Nicolas Kugel qui, lui, était toujours à saisir. Les deux frères ont en revanche vendu le monument de couronnement de l’empereur Charles VI, Vienne (1711) ainsi qu’une table en marqueterie représentant les victoires de Charles Quint, vers 1560. Cette année, c’est Bob Haboldt qui a eu les honneurs du Rijksmuseum, qui lui a acheté La Rupture de la digue de Saint Antoine, 1651, de Jan Asselijn (prix annoncé : 1,2 million d’euros), tandis que la galerie Tomasso Brothers a vendu une paire de miniatures de Liotard (autour de 275 000 euros). Dans la section antiquités et objets d’art, la galerie Vanderven a cédé une cloche bo, Chine, Ve-IIIe siècle av. J.-C. (autour d’1,2 million d’euros), Merrin Gallery, une figurine de Xipe Totec (affichée à 2 millions) et Sycomore Ancient Art (Genève) une sous-enveloppe de sarcophage (autour de 200 000 euros).
Du côté de l’art moderne, la galerie Gradiva s’est délestée, entre autres, de Salomé au jardin, de Gustave Moreau, de toute beauté (plus de 2 millions d’euros). Jean-Michel Basquiat ornait plusieurs stands, notamment chez les galeries Kukje/Tina Kim (New York) avec Self portrait, toujours à vendre (7 millions de dollars) et chez Odernatt-Vedovi, GE, coréalisé avec Warhol en 1984-1985 (vendu) ou encore à la galerie Boulakia, qui par ailleurs avait aménagé une « chapelle » dédiée à Chagall en hommage à l’exposition qui se tient à Bruxelles jusqu’en juin. Chez Tornabuoni, un Fontana jaune était réservé à 9 millions d’euros. Dans la section design, Yves Macaux organisait un solo show autour de Gustave Serrurier-Bovy, présentant les œuvres les plus modernistes de ce designer belge, mort en 1910, et vendait la moitié de son stand, tandis que François Laffanour faisait sensation avec son mobilier « dépouillé » peu connu de ce côté de l’Atlantique, issu de la communauté américaine Shaker.
Malgré tout, et notamment l’annonce d’un marché mondial de l’art en pleine forme, des pièces phare restaient encore à saisir en fin de deuxième semaine, comme Le Rêve de saint Joseph, de Murillo (Caylus), une paire de candélabres par Paul Storr chez Koopman (2,1 millions d’euros), Femme en prière, de José de Mora (Coll&Cortès), proposée à 2 millions d’euros, Le Moulin d’Alphonse Daudet, de Van Gogh chez Dickinson (10 millions d’euros) ou le médaillon ayant appartenu à l’Impératrice Eugénie (4,7 millions d’euros, S. J. Phillips). Mais les retombées d’une foire peuvent se prolonger sur plusieurs mois…
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Tefaf tient son rang
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°432 du 27 mars 2015, avec le titre suivant : Tefaf tient son rang