Nombre de galeries profitent du \"Mois de la Photo\" pour présenter des artistes-photographes. Pour acquérir ses lettres de noblesse, la photographie a dû devenir un moyen artistique comme un autre : peut-être doit-elle désormais se singulariser et retrouver une spécificité. Seton Smith, jeune artiste américaine de Paris, présente ses derniers tirages à la galerie Gilbert Brownstone (26, rue Saint-Gilles), du 5 novembre au 15 décembre. Paysages et intérieurs sont ses sujets de prédilection, qu’elle traite selon une approche distanciée qui n’est cependant pas exempte de romantisme.
Tout à l’opposé certainement d’Andres Serrano, dont les premières images scandaleuses avaient offusqué quelque sénateur américain, ressuscitant d’anciens réflexes de censure aveugle. On redécouvrira à la galerie Yvon Lambert (108, rue Vieille du Temple, jusqu’au 12 novembre) l’univers impitoyable d’un artiste pour lequel aucun sujet n’est tabou, mais qui ne manque jamais de donner à la cruauté du monde qu’il saisit une dimension morale.
L’Anglais Stephen Willats fait figure de pionnier dans l’utilisation tous azimuts de l’image photographique. Il créé aussi des vêtements dont les poches fourmillent de signes. La galerie Gabrielle Maubrie (24, rue Sainte-croix de la Bretonnerie, à partir du 12 novembre) présente ses dernières trouvailles. Plus américain, plus conceptuel, moins humoristique, Victor Burgin lui aussi compose avec l’image et le langage écrit. Cette fois, "The End" est le mot-clef pour l’exposition de la galerie Michel et Liliane Durand-Dessert (28, rue de Lappe, du 5 novembre au 31 décembre). Rodney Graham s’est fait une spécialité des prises de vue inversées et des dispositifs extrêmement complexes qui sollicitent parfois le masochisme du collectionneur.
La galerie Philippe Nelson (40, rue Quimcampoix, jusqu’au 3 décembre), qui a édité de nombreux multiples de cet artiste, présente à nouveau ses dernières productions. L’univers de la photographie est très contrasté et rien n’a moins de rapport avec Rodney Graham que Helmut Newton (galerie Vallois, 36, rue de Seine, du 3 novembre au 15 janvier) mondialement connu pour ses femmes nues. Quand l’art du casting se substitue à celui de la photographie, le résultat ne fait aucun doute.
En attendant un inévitable "mois de la vidéo", le pape incontesté de la discipline, Nam June Paik est à la galerie Philippe Gravier (7, rue Froissart, jusqu’au 24 décembre) et également à l’American Center (jusqu’au 1er décembre). Toujours inattendu, le vidéaste ne cherche même plus à déconcerter son public mais à lui renvoyer des signaux inclassables à l’usage incertain. Question de génération, sans doute, Thomas Hueber (galerie Burrus, 16, rue de Lappe, du 5 novembre au 31 décembre) est beaucoup plus précautionneux : il est vrai qu’il s’agit moins pour lui de produire une œuvre que d’inventer un prétexte à des discours théoriques et sociologiques qu’il aime à prononcer in situ. Le dernier travail de Barbara Bloom, New-yorkaise radical-chic qui "lit Lolita dans l’obscurité" pour une édition à vingt-quatre exemplaires, est présenté à l’excellente librairie Florence Loewy, 46 avenue René Coty, où l’on trouve le meilleur choix de rares multiples d’artistes contemporains.
Il reste malgré tout quelques expositions de peintres dans les galeries. Après l’exposition de dessins présentée il y a peu au Centre Pompidou, Marc Blondeau et Claude Berri ont conjugué leurs efforts pour présenter des peintures murales inédites et des dessins de Sol Lewitt jusqu’au 17 décembre, à la galerie 14/16 Verneuil et à Renn Espace, 7 rue de Lille, jusqu’au 25 février. Herbert Brandl, lui, appartient à la jeune génération autrichienne qui a redécouvert l’informel au milieu des années quatre-vingt. La galerie Samia Saouma (16, rue des Coutures Saint Gervais, du 5 novembre au 31 décembre) propose ses derniers tableaux hédonistes.
La peinture de Jean Zuber (galerie Philippe Casini, 13, rue Chapon, jusqu’au 26 novembre) a une origine ésotérique et se cantonne dans l’inachèvement. Manque à cette rubrique le design, considéré comme l’un des beaux-arts : "1950" à la galerie Catherine et Stéphane de Beyrie (10, rue Charlot, jusqu’au 25 novembre) rassemble des pièces importantes et originales de mobilier de Jouve, Noll, Mouille, Perriand, Prouvé et Royere.
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Paris : de la photographie au design
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°8 du 1 novembre 1994, avec le titre suivant : Paris : de la photographie au design