PARIS
L’exposition collective « Madeleine » rassemble les œuvres d’une dizaine d’artistes qui auscultent les effets du temps sur la mémoire et les objets.
Paris. La galerie Dohyang Lee a dix ans cette année. Elle les fêtera discrètement, de la même manière qu’elle défend depuis 2010 des artistes émergents. Soit qu’elle les accompagne sur le long terme, comme Violaine Lochu, lauréate 2018 du Prix AWARE ou Elisabeth S. Clark, programmée en 2015 dans le cadre du Hors les murs de la Fiac. Soit qu’elle accueille à la façon de cartes blanches leurs projets personnels, tels ceux de Marcos Avila Forero, lauréat 2019 du prix de la fondation Ricard ; de Julien Creuzet et de Romain Vicari, pour leur première exposition respectivement en 2013 et en 2015. Ou encore de Louis-Cyprien Rials, avant qu’il soit distingué, l’année suivante, par le prix SAM Art Project pour l’art contemporain. Connue des amateurs de talents en herbe, régulièrement soutenue par le Cnap, la galerie tient sa ligne éditoriale aux avant-postes. Même si, de prises de risque commerciales en crises diverses, les temps n’en finissent pas d’être durs.
Au lendemain du confinement, elle propose une exposition collective, « Madeleine », hommage proustien pensé et élaboré bien au-delà d’un group show bouche-trou et dont les prix démarrent autour de 500 euros. On y retrouve des artistes tels que Jenny Feal, vue il y a quelques mois au Musée d’art contemporain de Lyon, dans le cadre de la Biennale. Pour cette exposition très littéraire, la galerie a retenu une seule de ses pièces, Diario (voir ill.), assiette en céramique transformée en page de journal intime et politique, souvenir de Cuba. L’écriture est liée au souffle dans Diaphragme d’Alexandra Riss, rituel performatif poétique dont demeurent une robe brodée de fil noir et le son d’une respiration, entre deuil et renaissance. Elisabeth S. Clark étire, quant à elle, un long fil métallique textuel, After a long time or a short time ; elle dilue l’encre violette de Billets doux et pose une invitation à la manière d’une lettre manuscrite, Prenons ce temps.
Deux artistes coréens se distinguent par ailleurs de cette sélection qui fait cohabiter en bonne intelligence, sur les deux niveaux d’un espace pourtant réduit, sculptures, impressions, pièces sonores et vidéo. Au rez-de-chaussée, le mur principal est ainsi réservé à un ensemble de tirages photographiques en noir et blanc de Minja Gu (née en 1977) immortalisant en vanités translucides les déchets de sa résidence à Gand. La beauté cristallisée de deux trognons de pommes changés en glaçons surplombe l’ensemble, vestiges rudimentaires et universels de l’idée de civilisation. Cette artiste, lauréate 2018 du Korea Artist Prize a vu son travail exposé au National Museum of Modern and Contemporary Art, à Séoul, l’été dernier. Son œuvre, essentiellement constitué de performances et de vidéos, reste à découvrir en France. Au sous-sol, The art of Shovel, petit film de Doyeon Gwon (né en 1980) fait surgir sans paroles un univers aux frontières de l’enfance et aux confins de la ville, parfum de nostalgie saisi dans de lumineux contrastes noir et blanc.
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Parfum de nostalgie à la galerie Dohyang Lee
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°548 du 19 juin 2020, avec le titre suivant : Parfum de nostalgie à la galerie Dohyang Lee