Une vidéo de Fontana en pleine action bientôt projetée à la galerie Tornabuoni.
Parallèlement à la rétrospective que le Musée d’art moderne de la Ville de Paris consacre à Lucio Fontana du 25 avril au 24 août, la galerie Tornabuoni Art, considérée comme la plus importante au monde pour l’art italien d’après-guerre, présente également une exposition de l’artiste italien (1899-1968) avec un événement : la révélation d’une toile importante jusqu’alors inconnue. Michele Casamonti qui est à la tête des six adresses de la galerie (quatre en Italie, une en Suisse et une à Paris) explique sa découverte.
Comment avez-vous retrouvé cette œuvre ?
Il y a quelques années, un collectionneur me propose un tableau de Fontana. Il s’agit d’une toile dorée, d’un très grand format (plus de 2 m de haut sur 1,40 m de large), étonnant pour l’artiste. Et rarissime. L’œuvre me fascine tout de suite, je vérifie dans le catalogue raisonné où elle ne figure pas. Je ne l’acquiers donc pas. Les années passent, je retrouve le collectionneur et nous commençons à faire des recherches en commun. En retraçant l’histoire de ce tableau qui avait été acheté par son père à Amsterdam, nous sommes arrivés en Belgique, où nous avons trouvé une trace de Fontana dans les archives de la télévision. Sur cette vidéo réalisée le 12 novembre 1962 et diffusée le 3 décembre 1962, on voit quelque chose d’unique : ce sont en effet, à ma connaissance, les seules images filmées existantes où l’on voit Fontana en train de travailler, en train de réaliser une œuvre, en direct, devant une caméra, à l’invitation de l’artiste Jef Verheyen. Et cette œuvre, c’est ce tableau jusqu’alors inconnu et qui était donc encore dans une collection privée, Le rêve de Moebius (1962).
Vous avez donc du même coup retrouvé la vidéo que vous présentez également ?
En ce qui concerne les recherches sur Fontana, tout le monde se focalise logiquement sur l’Italie. Or cette vidéo n’y était pas, elle était même inconnue de la Fondation Fontana, des critiques et des spécialistes qui ont travaillé sur lui et elle se trouvait… en Belgique. Elle n’est toutefois pas inédite, puisqu’elle a déjà circulé, notamment au Palais de Tokyo, où elle a été présentée il y a un an par la critique Valérie Da Costa, mais personne ne s’est rendu compte de son importance historique. Il s’agit d’un document filmé de 9 minutes et la performance de Fontana réalisant son œuvre ne dure qu’une vingtaine de secondes. Le document est essentiel parce qu’il montre le rapport physique de Fontana à sa toile, comment il se positionne et se projette ; il nous révèle que si l’exécution est rapide, il y a le double de temps de préparation ; enfin en quelques phrases simples et très éclairantes, Fontana explique qu’il a fait ses premiers trous sur la toile en 1949, que la fente n’arrive qu’en 1959, mais que le concept est exactement le même.
Comment se porte le marché des artistes italiens aujourd’hui ?
2013 a été une année magique et extraordinaire pour les artistes italiens, puisque cinq d’entre eux ont établi des records mondiaux en ventes publiques : une Fine di Dio de Fontana, datée de 1963, a atteint presque 21 millions de dollars avec les frais, Manzoni, 14 millions d’euros, Castellani près de 2,9 millions en dollars (estimée entre 600 000 et 900 000 dollars environ), plusieurs tableaux de Dadamaino ont dépassé les 130 000 euros, alors que son marché n’existait quasiment pas il y a encore peu. Cette génération d’artistes commence à prendre une place importante, comme en témoignent outre la mise à l’honneur de Fontana à Paris, l’importante rétrospective que le Musée Guggenheim à New York va consacrer l’année prochaine à Alberto Burri…
Et concernant plus précisément celui de Fontana ?
Fontana est en train de devenir l’un des artistes au marché le plus solide sur le plan mondial. En faisant abstraction de son record lors de cette vente chez Christie’s en novembre dernier, son marché est désormais stable et à la hausse, même pour des tableaux de formats normaux (50 x 50 cm ou 50 x 60 cm) qui valent, en moyenne, 2 millions de dollars. Aujourd’hui il n’y a que ses céramiques qui ont un prix moindre, puisque pour 100 000 ou 200 000 euros on peut acheter une très belle pièce. Fontana est sans doute l’artiste le plus apprécié, il est une icône de l’art italien. Il n’y a d’ailleurs pas un seul grand musée au monde qui ouvre sans avoir une toile de Fontana. Il est donc assez logique qu’en ce qui concerne l’art italien, il soit l’artiste le plus onéreux de la seconde moitié du XXe siècle et le plus coté avec Modigliani du siècle entier.
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Michele Casamonti, « Nous avons retrouvé une vidéo historique de Fontana »
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Abonnez-vous dès 1 €Du 23 avril au 21 juin, Galerie Tornabuoni Art, 16 avenue Matignon, 75008 Paris, tél.01 53 53 51 51, http://www.tornabuoniart.fr/, lundi-samedi 10h30-18h30.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°408 du 28 février 2014, avec le titre suivant : Michele Casamonti, « Nous avons retrouvé une vidéo historique de Fontana »