L’ artiste italien redessine l’espace de la galerie Balice Hertling avec les dessins, peintures et sculptures emblématiques de son œuvre.
Paris. Un revenant ! Enzo Cucchi, l’un des 3 C (avec Sandro Chia et Francesco Clemente) qui, avec notamment Mimmo Paladino, incarnaient le mouvement de la trans-avant-garde italienne lancé par Achille Bonito-Oliva à la fin des années 1970, n’avait pas eu d’exposition personnelle en galerie en France depuis 1987, chez Crousel-Hussenot ! Mais celui qui (né en 1949, près d’Ancône) avait eu les honneurs en 1986 du CAPC de Bordeaux et du Centre Pompidou, n’avait pas cessé pour autant de travailler et exposer, surtout en Italie et ailleurs en Europe.
On le retrouve donc trente ans plus tard, aussi fort, et resté fidèle aux différents axes qui en avaient fait l’un des artistes phares et stars des années 1980. À commencer par sa passion du dessin qui a toujours ancré son travail et qui constitue la colonne vertébrale de ses différentes pratiques, aussi bien les dessins sur papier, évidemment – à l’exemple des quatre présentés ici – que la sculpture qui, comme cette petite madone en bronze plaquée contre un mur, est en fait un dessin en relief ou les toiles dans lesquelles le dessin guide et structure toujours la peinture. Le deuxième axe, magistralement mis en avant ici, pour sa première exposition chez Balice Hertling, concerne la grande attention que Cucchi porte à l’espace dans lequel il intervient et le grand soin porté à l’accrochage qu’il réalise lui-même. La preuve en est donnée avec un grand tableau accroché sur le mur qui nous fait face dès l’entrée de la galerie. Peint à l’acrylique sur une toile dorée qui recouvre une partie en relief et en résine, l’œuvre est la seule de cette première salle, laissant vide les autres murs. « Au lieu de remplir l’espace, je décide de le vider, ce qui est beaucoup plus difficile » indique Cucchi. Ses dessins ne sont-ils pas accrochés aux murs, mais flottants, car suspendus par des filins en acier comme un appel à circuler au milieu d’eux… ? Ce souci de l’espace se retrouve ainsi dans la façon dont il colle au coin d’un mur deux petites toiles laissant vaquant l’espace blanc tout autour. L’équilibre de l’ensemble n’est pas facile à tenir, or il tient et d’une très belle manière.
Enfin Cucchi est également resté attaché à ses thèmes et à son iconographie. « C’est normal, sinon je serais un extraterrestre. On travaille avec les choses que l’on connaît », sourit-il. On retrouve donc ses références aux mythes et à la culture (comme cette moitié de tête sumérienne dans un petit tableau), son attachement à la figure et cette réflexion sur la façon dont justement on installe une figure dans l’espace de la toile ou du papier. Dans plusieurs œuvres est ainsi évoquée l’image d’un cheval ou d’un âne. « Mais qu’importe l’animal, ce qui compte c’est la façon dont on le fait tenir sur ses pattes », explique Cucchi qui n’hésite pas à rappeler que « ce qui comptait pour Masaccio, c’était comment mettre un homme sur le sol, le poids de la figure dans l’image ». De 110 000 euros pour le plus grand tableau à 8 000 euros pour les petits, les prix n’ont rien d’indécent, pour un artiste certes peu connu aujourd’hui en France, mais quand même historique.
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Les pépites de Cucchi
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Abonnez-vous dès 1 €Enzo Cucchi, jusqu'au 3 février, galerie Balice Hertling, 239 rue Saint-Martin, 75003 Paris
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°492 du 4 janvier 2018, avec le titre suivant : Les pépites de Cucchi