Galerie

Paysages

Les paysages de Vincent Bioulès

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 19 juin 2013 - 820 mots

La galerie Vieille du Temple expose une vingtaine de paysages de Vincent Bioulès inspirés de lieux du Midi chers au peintre et reconstitués de mémoire dans son atelier.

PARIS - Formé à l’école de Supports/Surfaces dont il fut l’un des membres fondateurs au début des années 1970, Vincent Bioulès a conservé de cette courte aventure un certain talent à marier figuration et non-figuration. En témoigne Maguelone, temps gris accroché dans l’entrée de la galerie et composé de quatre bandes horizontales mouchetées de fines petites touches claires. Au ciel gris perle, répond la mer gris-bleu barrée par une langue de terre vert foncé. On se trouve aux portes de l’abstraction dans cette toile peinte en 2012-2013, où le temps semble comme suspendu. Cette même juxtaposition de bandes horizontales – le ciel, la mer et une chaîne montagneuse qui s’étire à l’horizon – apparaît dans Midi où le peintre s’adonne aussi à des recherches atmosphériques et chromatiques. La lumière violente et blanche qui sculpte la plage au premier plan contraste avec le ciel bleu cobalt et lourd de l’arrière-plan qui s’assombrit à l’approche de l’orage. Un peu plus loin, dans une autre salle donnant sur une cour intérieure, se trouve une autre toile saisissante : un homme et une femme, seuls, plantés sur une plage font face à l’immensité de l’océan, cône sombre et tourmenté, éclairé par un ciel bleu outremer bombardé d’un crépitement de petites touches rouge pâle, blanches et jaunes. Caspar David Friedrich n’est pas loin. Pour cette deuxième exposition personnelle consacrée à Vincent Bioulès, la galerie Vieille du Temple a sélectionné une vingtaine de paysages récents de l’artiste. Beaucoup d’huiles – des grands et des petits formats – mais aussi quelques dessins : fusain, tempera, aquarelle. L’occasion de (re)découvrir les lieux qui hantent sa peinture depuis de longues années : le Gévaudan, la Margeride, le pic Saint-Loup mais aussi le petit village de Laubert, en Lozère, où la famille Bioulès passa de nombreux étés. C’est une autre facette du peintre qui apparaît ici. Un Bioulès hectique, saisi d’une ardeur boulimique à retranscrire tout ce qu’il voit, d’une urgence à témoigner du réel. Ce réel si difficile à saisir et jamais complètement acquis. Sous son pinceau, la lumière d’été nimbe la villégiature familiale. Il figure les collines jaunies par le soleil, la promenade ombragée qui ceinture le bourg, les vaches qui paissent en robes blanches et les petits nuages meringués qui flottent dans le ciel bleu pâle.

Relier ce qui est dispersé
Emporté par un appétit de tout montrer, de tout peindre, il réalise des toiles saturées, chargées de motifs et de références. Des œuvres qui peuvent décontenancer un public trop pressé qui ne prendrait pas le temps de s’abandonner à l’expérience sensorielle, de se laisser emporter par ces tableaux qui traduisent le bonheur de transcrire les petits miracles du quotidien : la vibration de l’air, l’indicible que la peinture seule peut révéler. « Le but du peintre est de montrer aux gens des choses qui sont à côté d’eux et qu’ils ne voient pas, explique Bioulès. Figurer, ce n’est pas représenter le réel, c’est faire accéder au réel. C’est passer du réel à la réalité. La peinture nous permet de suturer, de relier ce qui était dispersé. » Vincent Bioulès aime se mettre au défi, mais aussi désarçonner en faisant surgir quelque chose d’inconnu dans son travail. Ici, une ombre fuit le long du mur d’une propriété tandis qu’une petite éolienne se dissimule derrière un platane (Le chemin de Jacques Bonnal, 2012-2013). Là, des cernes lourds et gras enveloppent les arbres et les nuages d’un paysage provençal (D’après le croquis de maman, 2010-2012) rappelant la peinture grave du Languedocien Auguste Chabaud. Vincent Bioulès est représenté par plusieurs galeries en France : Hélène Trintignan à Montpellier, Alain Paire à Aix-en-Provence et Marie-Hélène de la Forest Divonne (galerie Vieille du temple) à Paris qui a pris le relais de la galerie Vidal-Saint Phalle. La majorité de ses collectionneurs sont français. Pour acquérir une belle huile du peintre, il faut compter entre 8 000 (80 x 100 cm) et 25 000 euros (195 x 130 cm). Les petits formats (20 x 30 cm) peints sur le vif, ses petits tableaux « sauvages », se négocient, eux, entre 1200 et 1500 euros. Pour un dessin de bon format, comptez entre 3 000 et 6 000 euros. En galerie, sa cote reste stable. En vente publique, où ses œuvres sont rares – particulièrement depuis dix ans –, ses toiles ne dépassent pas 3 000 à 6 000 euros. La rétrospective Vincent Bioulès, programmée en 2016 au Musée Fabre de Montpellier, devrait permettre d’attirer les projecteurs sur cette œuvre qui tente d’aborder la figuration sous un jour nouveau.
 

VINCENT BIOULÈS

Jusqu’au 13 juillet, Galerie Vieille du Temple, 23, rue Vieille du Temple, 75004 Paris, Tél : 01 40 29 97 52, www.galerievieilledutemple.com

VINCENT BIOULÈS

Nombre d’œuvres : une vingtaine

Artindex France : 722
 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°394 du 21 juin 2013, avec le titre suivant : Les paysages de Vincent Bioulès

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