Les maisons de ventes organisent de plus en plus de vacations au moment de la foire, l’occasion d’un beau succès pour Christie’s.
PARIS - Alors que les foires satellites, les expositions dans les musées, les événements dans les galeries foisonnent pendant la Fiac (Foire internationale d’art contemporain), les maisons de ventes s’inscrivent de plus en plus dans leur sillage : cette année, une quinzaine de vacations étaient programmées en marge de la manifestation. « Il faut profiter de ce moment pendant lequel tous les acheteurs mondiaux et européens sont présents. La programmation de ventes participe de ce cercle vertueux qui profite à l’ensemble du marché, en mettant en relief l’activité culturelle de la place de Paris », explique Édouard Boccon-Gibod, directeur général de Christie’s France. Alors que l’on craignait un recul de la clientèle internationale, ces vacations ont bien fonctionné dans l’ensemble. Ce sont les propositions thématiques ou les collections qui ont remporté le plus de succès, tandis que les vacations généralistes ou moins sélectives étaient à la traîne.
4 ventes chez Christie’s durant la Fiac
Christie’s renforçait cette année la stratégie engagée depuis quelques saisons, qui consiste à sortir de son calendrier traditionnel pour se caler sur les grands événements. La maison avait ainsi organisé quatre ventes pendant la Fiac, du jamais vu, au cours de laquelle un volume d’affaires de 40 millions d’euros a été réalisé. La semaine démarrait avec un nouveau type de vente, « Avant garde », mêlant des œuvres d’art moderne et contemporain qui avaient marqué leur époque, une formule expérimentée avec succès à New York. L’ensemble a totalisé 20,5 millions d’euros. Un mobile de Calder ayant appartenu à Agnès Varda a mené la vente, cédé 2,3 millions d’euros, devançant un beau Nu à la baignoire de Bonnard qui a déçu, cédé « seulement » 1,8 million d’euros. Christie’s dispersait également une partie de la collection du cinéaste Claude Berri. Plusieurs toiles de l’un de ses artistes fétiches, Robert Ryman, étaient déjà parties au Qatar en 2011 ou chez Christie’s New York en mai dernier. Au sein de cet ensemble très éclectique, figurait une des peintures sur toile de coton de Daniel Buren, vendue 1,2 million d’euro, un record ; une huile sur papiers collés des premières années de Jannis Kounellis cédée 1,5 million d’euros ; ou encore un petit Monogold (MG 64) d’Yves Klein parti pour 1,2 million d’euros.
Autre ensemble dispersé avec succès, les 20 lots de la collection suédoise Bjäringer (comprenant un Paysage au nuage de Nicolas de Staël) qui ont cumulé 7,2 millions d’euros. En revanche, la vente généraliste d’art moderne, qui ne comportait pas d’œuvres phares, est restée largement en dessous de l’estimation (5,8 millions d’euros). « Le marché est plus sélectif, aussi les ventes “various owners” [propriétaires différents] peuvent avoir plus de mal à rencontrer leur public », concède Édouard Boccon-Gibod.
Une « proposition simple et audible »
Artcurial avait réitéré son intéressante formule autour de deux ventes complémentaires à l’offre de la Fiac : l’une de design, l’autre d’art urbain. « Lors de ces grands rendez-vous, l’attention est éveillée mais, pour exister dans ce brouhaha, il faut avoir une proposition et un message simples et audibles », explique Fabien Naudan, vice-président d’Artcurial. Pour sa vacation intitulée « Heavy Metal », la société avait ainsi sélectionné vingt pièces intégralement réalisées en métal, signées Charlotte Perriand, Jean Prouvé ou Mathieu Matégot, jusqu’à Marc Newson ou Ingrid Donat. « Aujourd’hui, il y a un chevauchement important entre le monde des amateurs d’art contemporain et ceux de design », note encore le spécialiste. L’intégralité a été vendue pour un montant de 2,7 millions d’euros, situé très au-delà de l’estimation. La vente a couronné le Chiffonnier de Marc Newson, réalisé à partir de plaques d’aluminium aéronautiques rivetées et cédé 1 million d’euros à un collectionneur asiatique. Une vente d’art urbain célébrait les 10 ans de la discipline chez Artcurial, dans une perspective historique. Mais cette vacation, qui aurait gagné à une sélection plus resserrée, n’a pas rencontré le succès escompté, laissant 40 % de lots sur le carreau.
Chez Sotheby’s, la vente de la collection Art déco d’Henri Chwast prévue cette semaine-là ayant été décalée, seule une exposition de ses temps forts était finalement organisée. De son côté, Drouot avait profité de l’effervescence pour organiser une exposition des pièces phares proposées à la vente jusqu’à la fin de l’année et, pour la première fois, ouvrait ses portes le dimanche. Une petite dizaine de vacations était programmée par Aguttes, Leclere, Magnin Wedry et d’autres, mais aucune n’avait réservé pour cette semaine précise une proposition de grande envergure. Parmi les lots phares adjugés lors de ces ventes, figuraient un ensemble de Le Pho adjugé chez Aguttes ou une huile de Bernard Buffet chez Leclere (213 860 euros).
88 % d’acheteurs internationaux chez Artcurial
Naturellement, les ventes profitent de la présence d’un public plus international qu’à l’accoutumée. Artcurial enregistrait ainsi 88 % d’acheteurs internationaux lors de sa vente « Heavy Metal ». « Beaucoup d’internationaux certes, mais rares étaient ceux que nous ne connaissions pas », note Fabien Naudan. Christie’s quant à elle relevait que les collectionneurs présents pendant ses ventes venaient de dix-huit pays différents. « L’effet ultra-positif est très simple, il y a beaucoup plus de monde dans les salles d’exposition : plus de 900 personnes le samedi. Vous touchez un public qui peut être en contact avec les œuvres, or les achats commencent par ce contact », souligne Édouard Boccon-Gibod. « Cela nous permet de voir réellement nos acheteurs, provinciaux ou internationaux, qui ne sont pas là en dehors des événements. Nous pouvons sortir de la relation lointaine que nous entretenons lors des achats live ou au téléphone », indique Damien Leclere.
Pourrait-on arriver à un trop-plein de ventes ? « Il ne faut pas sous estimer l’impact des dynamiques. C’est le même phénomène pendant le salon Rétromobile ou la Fashion week. La question n’est pas celle d’un excès d’offres, mais plutôt de l’architecture du calendrier international », estime Édouard Boccon-Gibod. Damien Leclere réplique quant à lui : « Il n’y a pas d’indigestion possible. J’espère que les opérateurs de Drouot vont proposer des ventes de plus en plus significatives. La communication autour de nos ventes n’en sera que démultipliée. »
Toutes les estimations sont indiquées hors frais acheteur tandis que les résultats sont indiqués frais compris.
Heavy Metal, le 25 octobre
Estimation : 1,6 M€
Résultat : 2,7 M€
Taux de vente : 100 %
Made in Urban, le 25 octobre
Estimation : 1,3 M€
Résultat : 1,2 M€
Taux de vente : 61 %
CHRISTIE’S Paris avant garde, le 20 octobre
Estimation : 15 à 24 M€
Résultat : 20,5 M€
Taux de vente : 85 %
Art moderne, le 21 octobre
Estimation : 6,8 à 9,8 M€
Résultat : 5,8 M€
Taux de vente : 85 %
Collection Claude Berri, le 22 octobre
Estimation : 5,5 à 7,9 M€
Résultat : 8,3 millions d’euros
Taux de vente : 86 %
Collection Bjäringer
Estimation : 5-7 M€
Résultat : 7,2 millions d’euros
Taux de vente : 95 %
LECLERE Art moderne et contemporain, les 24 et 25 octobre
Estimation : 740 000 €
Résultat : 725 000 €
Taux de vente : 54 %
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°467 du 11 novembre 2016, avec le titre suivant : Les enchères en tirent profit