Avec un produit d’adjudication total de près de 409 millions d’euros pour les seules ventes du soir d’art impressionniste et moderne, Christie’s et Sotheby’s atteignent un sommet à Londres. Cette progression de 30 % par rapport à 2013 a été réalisée malgré l’annulation de la dispersion des 25 tableaux de Miró, objet d’une polémique au Portugal.
LONDRES - Londres donne traditionnellement le coup d’envoi des grandes ventes de l’année avec des vacations d’art impressionniste et moderne très prometteuses. Les résultats 2014 sont bien au-delà des espérances, Christie’s et Sotheby’s ayant chacune réalisé leur plus haute vente de tous les temps dans la capitale britannique.
Le total cumulé des adjudications des deux maisons a atteint 340 millions de livres (1) (409,3 millions d’euros) pour les ventes du soir, un bond de 30 % par rapport à 2013, chiffre lui-même en hausse de 30 % par rapport à 2012 !
Un constat s’impose alors que les maisons avaient toutes deux misé sur de très belles collections sans pousser les prix. « Lorsque vous présentez des collections fraîches sur le marché, en bon état, avec des estimations raisonnables, le succès est là », explique Olivier Camu, vice-président du département art impressionniste et moderne chez Christie’s. « Ce marché où les chefs-d’œuvre se raréfient est de plus en plus fort et il n’y a jamais eu autant d’enchérisseurs », indique de son côté Aurélie Vandevoorde, directrice du département art impressionniste et moderne de Paris chez Sotheby’s. De fait, chacun note la présence de nouveaux acheteurs, avec des provenances géographiques de plus en plus diversifiées, en particulier d’Asie.
Retrait de 25 Miró
C’est à nouveau Christie’s qui dame le pion à sa rivale, mais dans une moindre mesure que ce qui était prévu : grâce à un résultat de 176 millions de livres (211,8 millions d’euros) pour ses ventes du soir, la maison a dépassé son estimation, ceci malgré l’annulation en dernière minute de la vente controversée des 85 Miró (25 pour la vacation du soir) du gouvernement portugais après une procédure judiciaire de députés socialistes du pays. Si l’on pouvait douter de la capacité du marché à accueillir autant d’œuvres de l’artiste espagnol en deux jours, Olivier Camu rétorque : « 85 Miró d’un coup, cela pouvait paraître excessif, mais nous avons constaté beaucoup d’intérêt du monde entier et nous pensons que la vente aurait été très solide. »
Dans la vente du soir, se détachait la collection d’un couple suisse anonyme, des œuvres jamais vues sur le marché, dont la majeure partie avait été acquise auprès des artistes eux-mêmes. Une Nature morte à la nappe à carreaux de Juan Gris, vendue 34,8 millions de livres (41,9 millions d’euros), près du double de son estimation, a permis d’établir un nouveau record pour l’artiste et pour une œuvre cubiste. « Nous atteignons les prix de l’art d’après guerre américain », se réjouit Olivier Camu. D’autres œuvres issues de la même collection ont réalisé de belles performances : une composition bleue et jaune de Mondrian (12,4 millions de livres, 14,9 millions d’euros), un dense Fernand Léger (12 millions de livres, 14,4 millions d’euros) ou un sombre Magritte, Les Chasseurs de la nuit (6,6 millions de livres, 7,9 millions d’euros). Carlo Carrà a quant à lui établi un record personnel avec Solitude (3 millions de livres, 3,6 millions d’euros), tandis qu’un portrait de Jacqueline Roque par Picasso s’est vendu sans excès (16,8 millions de livres, 20,2 millions d’euros).
De son côté, Sotheby’s a totalisé 163,5 millions de livres (196,8 million d’euros) pour sa vente du soir, largement au-delà de l’estimation. Très attendu, Boulevard Montmartre, matinée de printemps, de Camille Pissarro, a permis d’établir un nouveau record pour l’artiste aux enchères, avec un prix de 19,6 millions de livres (23,6 millions d’euros), plus du double de son estimation. Issue de la série iconique des boulevards, l’œuvre appartenait à l’industriel Max Silberberg. « Il s’agit d’un grand tableau impressionniste, peut-être le plus beau Pissarro passé en vente publiques de tous les temps, la plupart étant dans les musées », commente Aurélie Vandevoorde. Également sous le feu des projecteurs, la collection du marchand genevois Jan Krugier a fait un véritable carton, contrairement à la dispersion de son stock chez Christie’s en novembre 2013. « Le concept est très différent : il s’agissait de sa collection privée, établie en fonction de ses goûts personnels et de son œil rare, dans une vraie cohérence et avec des estimations raisonnables », précise la spécialiste. De la collection de ce grand amateur de papier se sont distingués une Composition de Picasso (10,4 millions de livres, 17,3 millions d’euros), record pour un dessin de l’artiste, et un petit bronze de Giacometti (8,5 millions de livres, 10,2 millions d’euros). S’est également vendu au double de son estimation le paisible L’Homme est en mer de Van Gogh (16,9 millions de livres, 20,3 millions d’euros), tandis que Kay Sage s’est arraché à 4,3 millions de livres (5,1 millions d’euros, est. 70 000-80 000 livres). L’année débute sous les meilleurs auspices pour le segment supérieur du marché de l’art.
(1) Tous les prix sont frais compris sauf indication contraire.
Estimation : 112-162,9 M£/134,5-195,70 M€ (h. f.)
Total : 176,9 M£/212,50 M€
Nombre de lots vendus : 65 sur 76
Taux de vente : 86 %
Estimation : 93-132 M£/112,7 à 160 M€ (hors frais)
Total : 163,5 M£/196,4 M€
Nombre de lots vendus : 79 sur 89
Taux de vente : 89 %
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La saison des ventes ouvre en fanfare
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°407 du 14 février 2014, avec le titre suivant : La saison des ventes ouvre en fanfare