Focus

La correspondance amoureuse de Jacques Mesrine

Lettres de Bruno à Joyce

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 19 janvier 2010 - 520 mots

Un ensemble de près de deux cents lettres autographes signées Jacques Mesrine est en vedette d’une vente d’autographes et manuscrits le 30 janvier à Drouot.

Insolite ? Pas si sûr. Il y a toujours eu des collectionneurs d’écrits de grands criminels et des amateurs de faits divers ayant marqué notre société. Les Américains ont une fascination pour ce genre de littérature, telles les lettres d’Al Capone, de John Dillinger ou de Bonnie & Clyde. En France, on voit parfois passer sur le marché des autographes de Marie Lafarge, célèbre empoisonneuse du XIXe siècle, de Landru (dont le plan dessiné d’un fourneau qui a pu servir à brûler des cadavres de femmes assassinées) ou encore des poèmes de Lacenaire pour 1 500 euros pièce. Le 5 février 2003 à Drouot, un lot de carnets intimes d’Anatole Deibler, dernier bourreau des exécutions publiques de la République, s’est envolé à 100 000 euros, dix fois son estimation.

Dans les années 1970, Mesrine fut désigné au Canada, puis en France, comme l’ennemi public numéro un. Les lettres qu’il a envoyées, alors qu’il était incarcéré, à sa maîtresse Jocelyne Deraiche, une jeune Canadienne de vingt ans qu’il rencontra lors d’une de ses cavales au Canada, constituent un document historique original. Leur liaison dure un an, leur correspondance quatre. Mesrine signe Bruno, nom que Jocelyne lui a donné, et lui l’appelle Joyce. Cette correspondance débute en juin 1973, après son évasion du tribunal de Compiègne, alors qu’il est emprisonné à la prison de la Santé et que Joyce est retournée au Canada. Elle se termine le 1er mai 1978, une semaine avant sa nouvelle évasion.

Dessins coloriés
« Il n’y a pas de référence pour évaluer un tel document unique, rappelle l’expert en autographes Frédéric Castaing. J’ai fixé une estimation basse de 300 euros par lettre, soit 60 000 euros l’ensemble. Il est intéressant de conserver cette correspondance dans sa totalité. » Dans une première partie qui regroupe cent onze lettres (1973-1976), « Mesrine écrit pratiquement tous les deux jours, avec une interruption du 6 juin au 22 octobre 1973 due à sa cavale après son évasion du palais de justice de Compiègne le 6 juin jusqu’à sa nouvelle arrestation. Il est plein de passion amoureuse et montre une personnalité complexe. Il admet sa violence. Il a horreur de l’injustice et du mensonge. Il se reconnaît truand sans avoir jamais rien fait de “sale” et base toute relation sur la confiance et le respect de la parole donnée », rapporte l’expert.

Une seconde partie rassemble soixante-dix-sept lettres (1977-1978). La quasi-totalité est agrémentée de dessins coloriés (des cœurs, des barreaux, des fleurs). « Mesrine aborde les problèmes de son livre [L’Instinct de mort, paru en février 1977], ses procès, les interviews de Joyce, sa volonté de la faire venir en France pour qu’ils se marient, résume Frédéric Castaing. Ses dernières lettres montrent sa volonté de ne pas finir sa vie en prison. » Mesrine est abattu le 2 novembre 1979.

JACQUES MESRINE

Expert : Frédéric Castaing
Nombre de lettres : 188
Période : du 1er juin 1973 au 1er mai 1978
Estimation : 60 000 à 80 000 euros

Vente le 30 janvier à Drouot, 9, rue Drouot, 75009 Paris, SVV Baron-Ribeyre & associés, tél. 01 42 46 00 77, exposition publique : le 29 janvier 11h-18h et le 30 janvier 11h-12h

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°317 du 22 janvier 2010, avec le titre suivant : La correspondance amoureuse de Jacques Mesrine

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