La foire parisienne poursuit son redressement dans un contexte difficile, avec encore quelques participations maladroites.
PARIS - L’équation à résoudre par les dirigeants d’Art Paris Art Fair est des plus complexes : proposer à Paris une seconde foire d’importance qui ne coure pas après la Fiac [Foire internationale d’art contemporain] et fasse donc montre de propositions à la fois alternatives et qualitatives, sans se fourvoyer dans des zones de seconde classe. Le tout dans un contexte économique difficile, qui faisait dire à une exposante lors du vernissage « qu’on n’est pas dans une période de spontanéité. Les collectionneurs viennent, mais c’est l’époque de la réflexion, voire de la restriction ». Certes la stratégie consistant à regarder ailleurs – soit vers des zones géographiques ou des enseignes non identifiées dans le « mainstream » – adoptée par l’équipe en place depuis 2012 semble être la bonne, car elle signe un renouveau qui permet de faire quelques découvertes. Mais la location du prestigieux et attractif Grand Palais lui coûte cher et il faut donc remplir le bâtiment en vendant du mètre carré… sans parfois parvenir à séparer le bon grain de l’ivraie.
Si la 15e édition de la manifestation, qui s’est tenue du 28 mars au 1er avril, atteste d’un niveau convenable faisant oublier les années de perdition, la foire semble se trouver aujourd’hui au milieu du gué, avec encore trop de propositions relevant du bric-à-brac. Augmenter le nombre de participants, passé de 125 à 144, n’est sans doute pas le meilleur moyen de parvenir à un nécessaire écrémage, car si quelques fautes de goût ont été évitées, la présence de certaines enseignes ne laisse d’interroger, à l’instar de la boutique de verroterie Venice Projects (Venise). Également, le décorum comme les œuvres de l’atroce « cabinet de curiosités » aux murs bleu nuit de Da-End (Paris) avaient tout pour piquer les yeux, tandis que le visiteur se perdait dans l’inutile fourre-tout de Sem-Art (Monaco), entre niaises céramiques et délires architecturaux des collectifs russes AES F et Electroboutique. La très bienvenue nouvelle section « Promesses », regroupant onze jeunes enseignes, a aussi mêlé des propositions attractives et bien construites – dans les galeries de Roussan (Paris), Edward Cutler (Milan), Backslash (Paris), Sator (Paris) ou Duplex 10 m2 (Sarajevo) – et d’autres plus inqualifiables que faibles.
Leroy, Klossowski, Hantaï
Il y avait pourtant sur le salon de quoi satisfaire les collectionneurs exigeants, ceux tentés par le classique mais pas uniquement. Les premiers pouvaient se rabattre chez Claude Bernard (Paris) pour dénicher des fusains d’Eugène Leroy, sur le stand Taménaga (Paris, Tokyo, Osaka) où trônait un très dur mais remarquable Bernard Buffet (L’Oiseau rouge, 1959), tandis qu’Alfa Galerie (Paris) proposait un beau Klossowski et Kalmán Mákláry (Budapest), quelques toiles de Simon Hantaï. Les plus contemporains pouvaient se rassasier chez JGM. Galerie (Paris) avec de belles pièces d’Allan McCollum et de Peter Kogler, sur le stand de Laurent Delaye (Londres) qui proposait Nolman Dilworth et Bill Culbert, ou chez Bernard Jordan (Paris) avec les céramiques délirantes d’Elmar Trenkwalder. Quelques galeries de province affichaient un bon niveau, telles Oniris (Rennes) où dialoguaient intelligemment tableaux de Vera Molnar et photos de Joël Denot, ou MAM Galerie (Rouen) consacrant son stand à une belle série de Calligraphies d’humeur (1968-1978) de Jean-Michel Sanejouand.
Hormis le stand étriqué de Cat-Berro (Paris) qui s’ouvrait sur un ridicule coffre-fort de Pucci De Rossi porteur des inscriptions « Koons & Hirst Associated » et « Pinault Safe Company » – on a connu commentaire plus affûté ! –, le secteur design a gagné en qualité même si un prétendu dialogue entre mobilier et œuvres d’art y apparaît forcé et artificiel.
Le commerce semble avoir été à l’image du salon, bon pour certains, fort mauvais pour d’autres, avec nombre de marchands rapportant avoir couvert leurs frais mais sans aller au-delà, et un seuil de prix très marqué, avec une très nette prédominance des transactions à petits montants (entre 5 000 et 10 000 euros, voire en deçà). Afin de parachever son redressement, Art Paris Art Fair devrait sans doute encore séduire quelques enseignes attractives et développer un profil mêlant singularité et qualité afin de faire venir les collectionneurs de contrées plus lointaines.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Art Paris Art Fair doit mieux faire
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°389 du 12 avril 2013, avec le titre suivant : Art Paris Art Fair doit mieux faire